La régulation des concentrations économiques, par le Conseil de la Concurrence, à l’ère de l’économie numérique.
La régulation des concentrations économiques, par le Conseil de la Concurrence, à l’ère de l’économie numérique.
Introduction
Afin de moderniser son Droit, et en analogie avec son choix d’ouverture sur la concurrence international, le Maroc a procédé à un réaménagement de sa scène juridique, dans le but de créer un écosystème favorable en matière de liberté des prix et de la concurrence. Cette dernière, qui peut être définie, comme la compétition économique qui se joue sur un même marché pour atteindre une fin économique déterminée.
Erigée en une institution constitutionnelle, le conseil de la concurrence Marocain, s’est vu attribué, lors de la dernière refonte de la constitution, des larges compétences en matière de régulation des marchés, de veille économique et juridique.
Ainsi, l’article 166 de la constitution dispose que, le conseil de la concurrence est une institution indépendante chargée, dans le cadre de l’organisation d’une concurrence libre et loyale, d’assurer la transparence et l’équité dans les relations économiques, notamment à travers l’analyse et la régulation de la concurrence sur les marchés, le contrôle des pratiques anticoncurrentielles, des pratiques commerciales déloyales et des opérations de concentration économique et de monopole.
À côté donc, de ces attributions purement consultatives, cette autorité administrative indépendante, s’est dotée d’autres mécanismes, lui permettent de réprimer, les différentes pratiques anticoncurrentielles, mais aussi de contrôler les opérations de concentrations économiques, pouvant nuire à la liberté d’entreprendre. Cette dernière catégorie d’opérations, qui constituent l’une des préoccupations, les plus marquantes, de ce Conseil.
Selon la CNUCED, sont définies, comme concentrations toutes formes de croissance externe, exprimées en termes de moyens ou en termes de résultats.
D’une part, en termes de moyens, tous les actes, quelle qu’en soit la forme, qui comportent un transfert total ou partiel de propriété ou de jouissance sur les biens, droits et obligations d’une entreprise.
D’autre part, en termes de résultats, tous les actes qui ont pour objet ou pour effet de permettre à une entreprise ou un groupe d’entreprises d’exercer, directement ou indirectement sur une ou plusieurs entreprises une influence déterminante.
Ceci dit, la raison d’être des pouvoirs de ce conseil, relatifs aux opérations de concentrations économiques, trouve son fondement, dans la prévention de la mise en œuvre, desdites opérations, quand elles tendent à créer des situations monopolistiques, ce qui peut engendrer par la suite des situations où la concurrence sera anéantie, mais également à la détection des éventuels conglomérats économiques profitant de l’absence, d’une autorité de régulation pour contrôler le secteur dans lequel ils agissent.
Dans ce même contexte, la révolution que connait le monde, en termes de prouesses technologiques, ne cesse de révéler les insuffisances du cadre institutionnel mais aussi réglementaires de la régulation de l’activité économique à l’échelle mondiale, de surcroît, les grandes sociétés technologiques ont bouleversé le paysage de l’entreprise au niveau mondial.
Ainsi, en 2009, la liste des 10 premières capitalisations boursières comprenait trois compagnies pétrolières et gazières et une seule entreprise technologique, en 2018, elle comptait cinq entreprises technologiques et deux places de marché en ligne. Nous assistons dés lors d’une nouvelle ère, celle de l’économie numérique qui a remis en cause et transformé en profondeur les processus de production, de distribution, de vente et de consommation des biens et services.
Donc, c’est à travers cette transformation et numérisation de l’économie mondiale, que le rôle décisionnel du conseil, en tant que régulateur des marchés, relatif aux opérations de concentrations, va se caractériser, d’une part, par un volet préventif de ses actions (I), mais aussi par un autre, lui permettant d’agir en aval de ses mêmes opérations (II).
Ces pouvoirs auront désormais à traiter, de nouvelles générations d’opérations économiques, et qui ne répondent pas parfaitement, au cadre légal actuel et qui poseront des difficultés, quant à l’application du droit de la concurrence, ainsi pour approcher cette problématique, j’aborderai, à titre d’illustration, un exemple de ces opérations, dont le Conseil, a entamé une procédure, en l’occurrence dans un secteur en plein mutations, celui des applications mobiles.
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Le Rôle préventif du conseil de la concurrence en matière des concentrations économiques
« Mieux prévenir que guérir », cet adage s’inscrit parfaitement dans la logique de la nouvelle constitution marocaine, qui a doté le conseil, d’un dispositif innovant, en lui permettant ainsi, de prendre connaissance des projets de concentrations économiques, les analyser, pour enfin prononcer son « jugement ».
Il s’agit d’un dispositif de contrôle a priori, reposant sur le principe de la notification préalable des parties, ces dernières qui doivent, avant de réaliser l’opération de concentration, en informer les autorités de la concurrence (1), lesquelles leur accorderont, après examen du dossier et le cas échéant, l’autorisation de mener leur projet à son terme (2).
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L’obligation de notification des opérations de concentrations économiques
L’obligation de notification, incombe aux personnes physiques ou morales, qui acquièrent le contrôle de tout ou partie d’une entreprise ou, dans le cas d’une fusion ou de la création d’une entreprise commune, à toutes les parties concernées qui doivent alors notifier conjointement. Le contenu du dossier de notification est fixé par voie réglementaire.
Tout d’abord il faut préciser le champ d’application relatif aux opérations de concentration économique (1), pour ensuite vérifier le contenu et la procédure de la notification (2) de ces opérations.
1.1 Le champ d’application des opérations de concentrations économiques
En premier lieu, et d’une façon général, l’article premier de la loi n°104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence, précise les personnes assujetties à cette loi.
D’une part, il s’agit, de toutes les personnes physiques ou morales, qu’elles aient ou non leur siège ou des établissements au Maroc, dès lors que leurs opérations ou comportements ont pour objet ou peuvent avoir un effet sur la concurrence sur le marché marocain ou une partie substantielle de celui-ci.
Et d’autre part, de toutes les activités de production, de distribution et de services y compris celles qui sont le fait de personnes morales de droit public lorsqu’elles agissent comme opérateurs économiques et non dans l’exercice de prérogatives de puissance publique ou de missions de service public. Mais aussi aux accords d’exportation, dans la mesure où leur application a une incidence sur la concurrence sur le marché intérieur marocain.
S’agissant des concentrations économiques, l’article 11 de la même loi, donne une délimitation conceptuelle, des opérations de concentrations économiques, il s’agit soit d’un cas de fusion, quels que soit sa forme, fusion-absorption ou fusion par création d’une entreprise nouvelle, ou bien encore de prise de contrôle d’une entreprise.
Aussi, c’est à travers, l’article 12 de la loi 104-12, et le décret pris pour son application que les seuils nécessaires, pour que ces opérations soient passibles au contrôle, sont fixées, et dont la notification deviendra obligatoire.
Ces seuils de chiffre d’affaires et de part de marché sont alternatifs. Il suffit donc qu’un seul de ces seuils soit rempli pour que l’opération soit soumise à notification :
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1er seuil : les entreprises réalisent un chiffre d’affaires cumulé de plus de 750 millions de dirhams au niveau mondial ;
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2e seuil : au moins deux entreprises réalisent un chiffre d’affaires individuel de plus de 250 millions de dirhams au Maroc ;
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3e seuil : les parties ont une part de marché cumulée d’au moins 40% au Maroc.
In fine, la notification de l’opération de concentration économique, au conseil de la concurrence, peut intervenir, dès lors que la ou les parties concernées sont en mesure de présenter un projet, suffisamment abouti, pour permettre l’instruction du dossier et notamment lorsqu’elles ont conclu un accord de principe, signé une lettre d’intention ou dès l’annonce d’une offre publique.
1.2 Le contenu et la procédure de la notification
Tout d’abord, une première question surgisse, c’est à qui, incombe l’obligation de notifier ? Ainsi et selon l’article 13 de la loi n°104-12, cette obligation, incombe aux personnes physiques ou morales qui acquièrent le contrôle de tout ou partie d’une entreprise ou, dans le cas d’une fusion ou de la création d’une entreprise commune, à toutes les parties concernées qui doivent alors notifier conjointement.
Le contenu de cette notification, est désormais régi par le décret n°2-14-652 du 1er décembre 2014, qui est substantiellement plus détaillé que l’ancien formulaire, les dossiers de notification doivent désormais suivre le formulaire prévu.
Ensuite, se pose une autre question, relative cette fois, au mode de notification. Le même article précité, indique que le dossier de notification, doit comprendre un bon nombre d’éléments (détaillés par l’annexe décret pris pour l’application de ladite loi), et qui doit être adressé, au Conseil, en quatre exemplaires.
Or, lorsque le Conseil, constate que le dossier est incomplet, ou que certains de ses éléments ne sont pas conformes, aux définitions retenues dans l’annexe susmentionné, notamment en ce qui concerne la délimitation des marchés concernés, il demande que le dossier soit complété ou rectifié.
La notification complète fait l’objet d’un accusé de réception. Dès réception du dossier, le conseil de la concurrence en adresse un exemplaire à l’autorité gouvernementale chargée de la concurrence.
Aussi et en application du 3ème alinéa de l’article 13 susmentionné, la réception par le Conseil, de la notification d’une opération de concentration économique, doit faire l’objet d’un communiqué publié par le Conseil sur son site internet, et dans un journal d’annonces légales, et est publié dans les cinq jours suivant la date de réception du dossier de notification par le conseil de la concurrence.
Dans la section suivante, nous allons mettre en exergue, l’une des opérations de concentration économique pour laquelle le Conseil a été saisi, en présentant ces premières conclusions relatives à cette même opération, cette dernière qu’on a prise comme illustration de la nouvelle génération d’opérations issues d’un marché promoteur et d’une économie numérique mondialisée.
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L’appréciation du projet de concentration au regard du droit de concurrence :
Cas du projet de concentration « Uber & Careem. »
La montée en puissance d’acteurs numériques mondiaux et le degré de leur concentration soulèvent des problèmes nouveaux pour la régulation de la concurrence, cela pousse les autorités de régulation de réfléchir aux moyens et outils à mettre en place pour relever le défi d’une économie numérique mondialisée, d’où l’intérêt que prend l’appréciation de telles opérations économique.
Pour cette raison, on a choisi, l’une de ces opérations, soumise désormais au régime de contrôle du Conseil. Il s’agit en l’occurrence, du projet de concentration « Uber & Careem. ».
2.1 La présentation du projet de concentration « Uber & Careem. »
Uber, anciennement UberCab, est une entreprise technologique américaine qui développe et exploite des applications mobiles de mise en contact d’utilisateurs avec des conducteurs réalisant des services de transport.
L’entreprise est basée dans la ville californienne de San Francisco, aux États-Unis. En 2015, elle est valorisée à 50 milliards de dollars, et ses applications sont commercialisées dans plus de 310 villes dans le monde.
Pour, Careem, il s’agit d’une société de réseau de transport basée à Dubaï, avec des opérations dans plus de 100 villes dans 14 pays au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie du Sud. La société était évaluée à plus de 2 milliards de dollars en 2018.
En mars 2019, Uber a acquis Careem pour 3,1 milliards de dollars. D’une façon générale, le Conseil de concurrence, apprécie toute opération de concentration économique, en examinant si elle est de nature à porter atteinte à la concurrence, notamment par création ou renforcement d’une position dominante ou par création ou renforcement d’une puissance d’achat qui place les fournisseurs en situation de dépendance économique. Dans le cadre de cet accord, Careem maintient une marque indépendante et opère séparément.
À ce titre, un projet de concentration économique a été notifié, conjointement par les deux géants et leaders mondiaux, Uber et Careem, des applications internet, mettant en relation des clients et des transporteurs. Ce projet, dont le Conseil, à décider initialement d’approfondir l’examen.
Or, et en consultant, le premier et seul article du titre premier de la loi n°104-12, relative à la liberté des prix et de la concurrence, on en aperçoit, la raison de originalité de cette opération, liant deux sociétés, où aucune d’elles ne dispose de siège au Maroc, mais qui cependant, développent des comportements susceptibles d’avoir un objet et effet sur la concurrence, sur le marché marocain.
2.2 L’appréciation des effets économiques de l’opération par le conseil de concurrence
C’est alors, à travers sa décision, publiée en B.O du 24 juillet 2019, que le Conseil, et après l’examen de sa compétence matérielle par rapport à l’opération notifiée, a vérifié les conditions requises par la loi, pour qualifier cette opération, comme étant une opération de concentration économique.
Ceci dit, cette première étape d’examen le conseil a consisté dans la vérification des conditions relative d’une part à l’existence d’un éventuel effet sur la concurrence sur le marché marocain, abstraction faite au siège des sociétés en question, et d’autre part à la nature juridique de l’opération de concentration, qui dans ce cas d’espèce, est faite d’une acquisition.
Cet examen a porté, également sur la conformité de cette opération, au regard des seuils, fixés par voie réglementaire, qui déterminent le caractère obligatoire de cette notification. Ces seuils, qui sont largement dépassés, dans ce cas d’espèce.
Ainsi, à travers cette notification, les parties en questions, ont inscrit l’opération, dans le cadre du secteur du transport, et plus particulièrement, la mise en relation d’utilisateurs et de chauffeurs pour ces divers services de transport.
Le Conseil, en examinant ce projet de concentration économique, a conclu, que les marchés, ainsi désignés par les parties, ne donnent pas, une réelle image sur la concurrence dans ce secteur, et ne représentent pas, la répartition territoriale, que l’administration fixe dans le domaine du transport des personnes.
Le Conseil, après ses investigations, a également conclu, qu’il s’agit des deux seules sociétés, proposant les applications susmentionnées, dans le marché du transport informel. Ceci pour « Uber » à partir de 2015 jusqu’au 2018, et pour « Careem », depuis 2018.
Par ailleurs, le Conseil, en examinant cette opération, à relever son risque potentiel, en terme de restriction à l’accès à ce marché, par la fusion des deux seules sociétés, exerçant dans ce dernier, dans l’absence de concurrents, de la taille de « Uber », réputée comme, la société leader dans ce secteur, mais a aussi considéré, que cette opération est susceptible de générer, par la suite, des prix monopolistiques.
C’est en application de l’article 15, de la loi n°104-12, et en prenant en considération que les parties notificatrices, n’ont pas présenté des informations claires, relatives à la stratégie des prix qu’elles comptent mettre en œuvre, à l’issue de cette opération, le Conseil a soumis, ce projet de concentration économique à une deuxième phase d’examen, dite Examen approfondi, et qui est censé, de donner une issue à cette opération.
Cette notification, qui d’ailleurs, selon le Conseil, n’a pas bien détaillé, aussi bien les objectifs économiques, que ses profits espérés, avec exactitude. Cette décision qui peut, donc, emprunter deux voies différentes, soit en l’autorisant ou au contraire, en l’interdisant.
Donc, en application des termes légaux, la décision finale, issue de l’examen approfondi, ne devra pas, dans tous les cas, dépasser les180 jours, suivant la date de publication de la décision initiale.
Cette décision, qui suscitera, surement, l’intérêt, aussi bien du public, que des professionnels du secteur, et qui constituera aussi, en quelque sorte, un cas d’école au Maroc, où l’autorité de concurrence, a récemment été réactivé après la nomination de Mr Guerraoui et les autres membres de ce conseil, par SM le roi.
D’une façon générale, cet examen, donnera lieu, théoriquement à deux sortes de décision, totalement divergentes, soit l’autorisation de l’opération en question, soit au contraire, l’interdiction de cette dernière.
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Le Rôle curatif du conseil de la concurrence en matière de concentrations économiques
Les pays développés disposent aujourd’hui d’une législation spécifique sur le contrôle des opérations de concentration, en plus des textes relatifs à l’abus de position dominante.
Si une grande partie de l’intervention du Conseil, dans le cadre des concentrations économiques, se concrétise dans le volet préventif, le volet curatif, lui aussi, ne manque pas, et il peut permettre au Conseil de compenser, d’une part, la non notification ou le non-respect des engagements pris dans le cadre d’un projet de notification soumis préalablement (1) à l’examen du Conseil. Et d’autre part, le Conseil détient, le pouvoir de réprimer, à postériori, à la base d’une exploitation abusive d’une position dominante (2).
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L’absence de notification, ou non-respect des engagements pris dans le cadre d’une opération de concentration économique
Tout d’abord, on observe qu’en vertu de ces nouvelles attributions, le contrôle des concentrations tel qu’il avait été opéré dans le cas du projet de fusion des cimentiers « Lafarge & Holcim » notamment, ne relève plus désormais de la seule appréciation du chef du gouvernement.
Rappelons qu’à l’époque, où la décision du chef du gouvernement a été prise d’autoriser la fusion, les décrets d’application des lois 114-12 et 20-13, conférant de nouvelles attributions au Conseil de la concurrence, n’étaient pas publiés et que pour cette raison ce nouveau dispositif légal n’était pas entré en vigueur.
Dans cette partie, nous aborderons, d’abord, l’issue d’une opération non notifié, pour ensuite s’interroger sur le sort des engagements des parties notifactrices d’opération de concentration.
1.1 Les sanctions prévues aux opérations de concentrations non notifiées :
Aux termes de l’article 19 de la loi n°104-12, si une opération de concentration a été réalisée sans être notifiée, le conseil de la concurrence enjoint sous astreinte, aux parties de notifier l’opération, à moins de revenir à l’état antérieur à la concentration.
En outre, le conseil de la concurrence peut infliger aux personnes auxquelles incombait la charge de la notification une sanction pécuniaire dont le montant maximum s’élève, pour les personnes morales, à 5% de leur chiffre d’affaires hors taxes réalisé au Maroc lors du dernier exercice clos, augmenté, le cas échéant, de celui qu’a réalisé au Maroc durant la même période la partie acquise, et, pour les personnes physiques, à cinq millions (5.000.000) de dirhams.
Aussi, si une opération de concentration notifiée et ne bénéficiant pas, de la dérogation prévue par la loi sur la concurrence, a été réalisée avant l’intervention de la décision prévue au premier alinéa du même article, le conseil de la concurrence peut infliger aux personnes physiques ou morales ayant procédé à la notification une sanction pécuniaire.
En cas d’omission ou de déclaration inexacte dans une notification, le conseil de la concurrence peut infliger aux personnes physiques ou morales ayant procédé à la notification une sanction pécuniaire. Cette sanction peut s’accompagner du retrait de la décision ayant autorisé la réalisation de l’opération.
A moins de revenir à l’état antérieur à la concentration, les parties sont alors tenues de notifier de nouveau l’opération dans un délai d’un (1) mois à compter du retrait de la décision, sauf à encourir les sanctions prévues aux premier et deuxième alinéas ci-dessus.
1.2 Les sanctions du non-respect d’engagements pris par les parties notificatrices
Selon le même article précité et s’il estime que les parties n’ont pas exécuté dans les délais fixés une injonction, une prescription ou un engagement figurant dans sa décision ou dans la décision de l’administration ayant statué sur l’opération, le conseil de la concurrence constate l’inexécution. Il peut :
1- retirer la décision, ayant autorisé la réalisation de l’opération. A moins de revenir à l’état antérieur à la concentration, les parties sont tenues de notifier de nouveau l’opération dans un délai d’un (1) mois à compter du retrait de la décision, sauf à encourir les sanctions prévues aux premier et deuxième alinéas ci-dessus ;
2- enjoindre sous astreinte, dans la limite prévue à l’article 40 de la présente loi, aux parties auxquelles incombait l’obligation non exécutée d’exécuter dans un délai qu’il fixe les injonctions, prescriptions ou engagements.
En outre, le conseil de la concurrence peut infliger aux personnes physiques ou morales auxquelles incombait l’obligation non exécutée une sanction pécuniaire telle que prévue aux opérations de concentrations non notifiées.
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La répression, à postériori, à la base d’une exploitation abusive d’une position dominante
Lorsqu’elle empêche le libre jeu de la concurrence, l’exploitation d’une position dominante est en principe prohibée, surtout si cette exploitation est née d’un accord ou d’une opération de concentration économique, c’est pourquoi, l’autorité de régulation est doté d’un arsenal législatif adapté et efficace, pour y faire face.
2.1 La position dominante, résultat d’une concentration économique, abusivement exploité :
Tout d’abord, est prohibée, lorsqu’elle a pour objet ou peut avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises, d’une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci.
Les abus de position dominante de la part des entreprises œuvrant dans des secteurs technologiques, l’étendue de leur contrôle sur les données et le préjudice causé non seulement aux consommateurs, mais aussi à la société constituent des sources de préoccupation croissante du conseil de la concurrence car certaines de ces firmes sont devenues presque indispensables aux consommateurs, au point de les considérer comme un service public !
Ainsi, une position dominante n’est pas en elle-même répréhensible. Seul est interdit l’abus de position dominante, c’est-à-dire l’exploitation d’une position dominante attentatoire au bon fonctionnement du marché. Il se dégage, alors, deux grandes catégories d’abus en la matière, à savoir les abus de comportement et les abus de structure.
2.2 La lutte contre l’exploitation abusive d’une position dominante :
Le conseil de la concurrence peut, en cas d’exploitation abusive d’une position dominante, enjoindre, par décision motivée, à l’entreprise ou au groupe d’entreprises en cause de modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé, le cas échéant sous astreinte, tous accords et tous actes par lesquels s’est réalisée la concentration de la puissance économique qui a permis les abus même si ces actes ont fait l’objet de la procédure prévue au présent titre.
Ainsi, c’est par la mise en cause et la nullité des actes et conventions, qui étaient à l’origine de cette position dominante, abusivement exploitée, que le conseil pourra réitérer son intervention en matière de lutter contre les opérations de concentration économique, qui ne respectent pas le libre jeu de concurrence.
Toutes ces mesures, sont sans doute, d’une grande efficacité, pour lutter et faire face aux différentes manifestations de l’exploitation abusive d’une position dominante, résultat d’une opération de concentration économique.
Conclusion
Il s’avère que la législation actuelle, relative à la concurrence et sa mise en application doit s’adapter à la prolifération de nouveaux secteurs d’économie et aux variantes de l’économie mondiale, caractérisée par la transition numérique,
Il est donc nécessaire d’adapter le socle sur lequel s’appuient les règles encadrant la concurrence en étendant la définition et le champ d’application de la réglementation de la concurrence.
Dans ce sens, l’analyse des opérations de concentration reste une méthode ex ante qui permet de résoudre les problèmes de concurrence qui pourraient découler d’une position dominante sur ce marché.
C’est pourquoi, dans cette économie numérique, le rôle du conseil de concurrence sera plus déterminant, dans la mesure ou ses interventions, abstraction faite de son timing, en amont ou en aval des opérations de concentration économiques, seront d’une grande influence sur l’établissement d’un écosystème sain et propice.
Pour conclure, une réflexion sur l’adaptabilité du droit de la concurrence est le meilleur outil pour répondre aux préoccupations de notre système juridique. Il serait peut-être plus efficace de les réglementer pour garantir un accès équitable à toutes les entreprises.
Soucieux des nouveaux défis de notre Droit de la concurrence, à la marge de la conférence internationale organisé par le conseil, sous le thème « politiques et droit de la concurrence, expériences nationales et partenariat international », le président de ce conseil, a déclaré, que le nouveau défi de son autorité, n’est que cette révolution numérique qui se développe, dans le cadre d’un système de l’économie mondiale, qui voit le développement de nouvelles générations de concentration économique et d’existence de règles de droit devenues non conformes et inappropriées au regard des nouvelles données dues marchés.
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