في الواجهةمقالات باللغة الفرنسيةمقالات قانونية

L’influence du temps envers l’exercice d’une action en justice

L’influence du temps envers l’exercice d’une action en justice

Abdelhak Elfakir    

Doctorant au Laboratoire Droit des Affaires – Fsjes Settat

Le droit prétend gérer le temps sans, curieusement, s’occuper de sa définition. On s’étonne de la démarche, tant le droit est soucieux de qualifier les choses. Traite-t-on du temps qui passe ou du temps qui demeure toujours, du temps qui engendre le changement ou du temps qui est le lieu de tout changement ? Le droit semble avoir à s’affronter aux apories du temps au singulier. Certes, bien des choses se comprennent mieux qu’elles ne se définissent et il en est ainsi, davantage encore que des notions morales, économiques ou politiques, du temps lui-même. On ne peut à l’évidence reprocher au juriste de ne point définir cette notion première, la question étant l’ordinaire du philosophe[1].

« Qu’est ce que donc que le temps ? se demandait Saint Augustin. Si personne ne me le demande, je le sais. Si quelqu’un pose la question et que je veuille l’expliquer, je ne le sais plus »[2]. Au-delà de la difficulté de définir ce qu’est le temps, cela témoigne de ce que la perception du temps est d’abord instinctive et intuitive. De la même façon, on perçoit d’instinct que le temps et le droit entretiennent des rapports étroits.

Mais aucune définition de la notion de temps n’a reçu une approbation unanime. Selon Hébraud, le temps se présente « comme une route parcourue à sens unique et irréversiblement par les événements, chaque jour précédant du passé et progressant vers l’avenir, selon la numérotation des jours, des mois et des ans, d’avance jalonnés avec une rigoureuse précision par les calendriers. Lieu figé, immuable et insensible, il assiste à l’agitation universelle sans y participer »[3].

Le propre de l’homme est de tenter de dominer le temps auquel il est soumis[4]. Le droit qu’il met en œuvre a pour objet de façonner le temps réel pour lui permettre de vivre en harmonie avec le monde qui l’entoure et s’impose à lui.

Le droit s’intéresse au temps, mais curieusement les juristes ont peu exploré les rapports du temps et du droit. De fait, l’impact du temps sur le droit, l’influence du droit sur le temps, la rencontre de ces deux éléments, leur fusion, n’ont pas autant suscité la réflexion que d’autres réalités juridiques. Peut-être la raison tient-elle au fait que le temps n’apparait pas au juriste digne, en lui-même, de réflexion.  Pour le juriste, le temps n’est qu’un élément dont on doit analyser les rapports avec le droit. Ce n’est que la qualité d’une substance considérée sous un angle particulier : c’est une qualité de persistance, de persévérance dans le fait d’être qui fait qu’une institution juridique nait, vit et meurt[5].

Les rapports du temps et du droit sont complexes et ambivalents et que les aspects de leur interférence et interaction apparaissent diversifiés. Si le temps s’impose au juriste comme une donnée de fait[6] qu’il a à subir, s’il a une action indéniable, voire une emprise sur le droit[7], comme sur l’ensemble des activités humaines et des situations individuelles, le droit réagit également à son tour sur le temps pour essayer de le canaliser et le conquérir afin de le transformer en un instrument à son service.

Il apparait que le temps du procès, le temps judiciaire diffère du temps juridique en général. D’abord, l’intervention d’un procès implique des impératifs nouveaux, le respect des droits de la défense et le souci d’efficacité du service public de la justice[8]. On sait que « le procès désigne non seulement le litige porté devant un juge, mais aussi la façon dont ce litige sera traité par la juridiction saisie, c’est-à-dire la soumission du litige au juge, autrement dit la procédure »[9]. S’il n’existe pas de définition unanimement admise du procès[10], nous pensons qu’il doit être défini comme le règlement juridictionnel des litiges devant le juge étatique.

Le temps est un instrument de politique processuelle. Le temps judiciaire est senti notamment comme un fardeau duquel il faut se débarrasser[11]. Les avocats ainsi que les justiciables dénoncent les lenteurs des procédures qui figurent néanmoins, la première affliction dont souffre la justice au Maroc.  Pour cela, la loi doit absolument instaurer des remèdes aux lenteurs négatives et des résolutions en vue d’une meilleure perception et conception du temps judiciaire. La politique processuelle tend à simplifier les délais de procédure et à concevoir des voies prompts de règlement des litiges afin d’obtenir des solutions utiles. Le temps est devenu consubstantiel au procès et à sa qualité : il est un principe indispensable de l’effectivité tangible du droit à une protection juridictionnelle[12]. Il faut trouver un juste équilibre afin que la justice soit à la fois efficace et respectueuse des droits de la défense. Le temps doit permettre de mieux comprendre, d’analyser, voire de perfectionner le procès civil.

 Le temps se révèle inséparable au procès[13]. Il en établie perpétuellement un principe majeur pour l’ensemble de ses acteurs de même que pour les professionnels du droit et l’opinion publique. Le temps processuel est cependant, défini comme l’image mobile de l’éternité immobile. Il est subi d’une allure dissemblable par les acteurs du procès. Il est remporté certains, déshonoré par d’autres. Chacun dispose d’un rapport au temps extrêmement distinct d’après la place qu’il s’approprie dans le procès et en proportion des révérences de l’espèce. Le temps est toutefois une donnée subjective du procès.

Le droit décerne à la durée un rôle d’extinction des droits. Il spécifie réellement des délais avec lequel le déversement indique l’extinction d’un droit : droit à faire assurer un moyen de défense ou une voie de recours, droit à entamer une action ou tirer profit d’un droit, etc. Les délais tiennent par leur disposition extinctive, une fonction sanctionnatrice.

L’action en justice est marquée par des délais de prescription et des délais de forclusion qui confèrent aux parties un délai incompressible pour son exercice. Cette dualité de nature est justifiée par une rigueur différente des délais.  La prescription extinctive fixe une durée pour la perte d’un droit substantiel, alors que la forclusion détermine l’existence d’une action en justice. Il correspond dès lors d’étudier récursivement la prescription (Partie I) et la forclusion (Partie II).

Partie I : La prescription

La prescription sanctionne, avant tout, la négligence à faire valoir un droit. Le droit organise à cette fin de nombreux délais de prescription, qui frappent par leur grande diversité. Les uns sont brefs, d’autres plus longs. Le temps de la prescription est également caractérisé par sa relativité : il est aujourd’hui plus bref en matière civile, alors qu’il tend à s’allonger en matière pénale. Surtout, la prescription civile lutte avant tout contre l’inertie d’un créancier ou du titulaire d’un droit, tandis que la prescription pénale a pour fonction première de tirer des conséquences de l’inertie de la puissance publique. La première répond à des considérations plus individualistes et subjectives, tandis que la seconde protège d’abord un intérêt collectif, celui de l’ordre public et de la paix sociale.

Elle est définie comme étant, un mode d’acquisition ou d’extinction d’un droit, par l’écoulement d’un certain laps de temps (d’un délai) et sous les conditions déterminées par la loi.[14] Cette définition porte sur deux caractéristiques majeures à savoir un mode et une fin. Son mode est l’écoulement d’un laps de temps et sa fin, un effet acquisitif ou extinctif. Seul l’effet extinctif concerne le temps imposé pour l’exercice de l’action.[15]

L’article 2219 du Code Civil Français définit la prescription comme «un mode d’extinction d’un droit résultant de l’inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps », alors que le législateur marocain définit à son tour, de manière implicite, la prescription extinctive dans l’article 371 du dahir formant code des obligations et contrats.[16]

La prescription extinctive dite aussi prescription libératoire, entraine l’extinction du droit (la perte du droit substantiel) par non usage de ce droit pendant un laps de temps déterminé (sauf pour les droits imprescriptibles). C’est un mode d’extinction de l’action en justice résultant du non-exercice de celle-ci avant l’expiration du délai fixé par la loi et qui rend irrecevable la demande formée après expiration du délai d’action et constitue une fin de non recevoir[17].

Pourtant, le but du législateur Marocain d’instaurer la prescription extinctive est semblable, à celui de son homologue français, est de ne pas remettre en cause ce qui est paisible. Tout part du principe de l’exercice tardif d’un droit troublerait sans raison l’ordre public. Cependant, la prescription extinctive puise dans des considérations ou se mêlent l’ordre public et des considérations morales. Il en va de la sorte à propos de la prescription extinctive qui se fonde à la fois sur l’idée de la préservation de la paix civile et sur la punition de la négligence prolongée du créancier.

Plusieurs raisons sont invoquées pour la justifier. La principale réside dans la nécessité d’éviter que les situations de fait qui se sont maintenues sans contestation pendant longtemps ne soient remises en cause au risque de compromettre la paix sociale. On fait valoir également que, dans certains cas, le silence et la passivité du titulaire du droit permettent de présumer qu’il a reçu satisfaction (présomption de paiement) ou qu’il a renoncé à l’exécution, voire qu’il mérite une sanction. Autre considération, nettement plus accessoire, est parfois mise en avant, celle du dépérissement des preuves.

La prescription répond conjointement à trois impératifs classiques : elle a pour fonction, par l’interdiction d’actions tardives, de dispenser le débiteur d’apporter la preuve de sa libération (fonction probatoire), mais aussi et surtout de consolider les situations de fait (fonction sécuritaire) et de sanctionner le créancier (ou le titulaire d’un droit) négligent (fonction morale).

La prescription permet de traduire l’équilibre opéré entre les intérêts privés des parties et celui du service public de la justice (A). En outre, sa pleine réalisation suppose, dans un souci d’équité, la possibilité de la moduler (B).

A- La détermination de la prescription

Les particularités de la fixation de la durée de la prescription démontrent qu’il existe une limite temporelle en vue de protéger par voie de justice des droits substantiels. Pourquoi choisir telle ou telle tranche de temps pour neutraliser l’action qui n’a pas été exercée ? Pourquoi ce délai n’est-il pas le même pour toutes les actions ? Comment le calculer de façon à éviter la spoliation du titulaire du droit et une trop grande insécurité des autres acteurs de la vie juridique ? Toutes ces questions méritent d’être posées (a). A ce sujet, la question du point de départ de la prescription extinctive prend un relief distinctif. Bien davantage que la fixation de la durée de la prescription (absolument arbitraire une fois que l’on s’est mis d’accord sur le type de prescription longue ou courte, que l’on souhaite voir appliquer), celle de son point de départ constitue l’outil décisif de ce difficile accord à concrétiser entre intérêts du créancier et du débiteur (b).

  1. La fixation de la durée de la prescription

Le temps stimule à la protection des droits substantiels et, dans son ensemble, à une certaine diligence. Dans certains cas, le silence et la passivité du titulaire du droit permettent de présumer qu’il a reçu satisfaction (présomption de paiement) ou qu’il a renoncé à l’exécution, voire qu’il mérite une sanction. La prescription est de toutes les institutions de droit civil, la plus nécessaire à l’ordre social[18]. L’ordre public n’est pas la finalité de la prescription mais c’est un effet que la prescription rencontre en chemin[19].

Le Dahir formant Code des Obligations et Contrats traite la prescription comme l’un des moyens d’extinction des obligations dans les articles 371 à 392, et a instauré la règle générale qui est de quinze ans dans l’article 387[20] qui est contraire à la législation française avant la réforme de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 (réforme qui a abandonné la prescription trentenaire comme prescription de droit commun) qui était de 30 ans, délai aussi long. Alors que, le code de commerce prévoit la prescription quinquennale[21] considéré comme étant le délai le plus long en matière commerciale en raison de la stabilité des transactions commerciales. Le délai est ici plus bref qu’en droit commun.

La détermination de la prescription progresse avec la société. Nous vivons aujourd’hui dans une société d’instantanéité, ou tout va plus vite. La perception du temps évolue. Cela explique l’impulsion de célérité du temps juridique en général, et de la prescription, en particulier. La durée des délais de prescription tend à se réduire sensiblement. Le temps de protection légitime des droits est de plus en plus court. On trouve en droit quelques dispositions qui laissent au juge, dans certains domaines, le soin de fixer lui-même un délai raisonnable pour l’exercice d’un droit ou d’une action[22] ou qui confient ce soin aux parties. Toutefois ces dispositions demeurent rares et leur portée limitée, ce qui s’explique fort bien car elles risquent de créer des disparités choquantes entre justiciables et de favoriser une très grande insécurité. Dans la plupart des cas, c’est la loi qui fixe une durée de principe.

Le Dahir formant Code des Obligations et Contrats Marocain a fixé un délai de 15 ans comme délai de droit commun. Il convient de préciser que le Docteur Mamoun Kouzbari s’est exprimé quant à cette durée, qui l’a estimé de convenable : durée non excessive quand à sa longueur qui accable le débiteur tel que prévue dans la législation française (avant la réforme de 2008), et non excessive quand à son court terme puisqu’il surprend le créancier tel que prévue dans la législation libanaise[23]. Mais cette prescription est souvent écartée au profit de délais plus courts dans la mesure où elle parait incompatible avec la rapidité et la célérité qu’exige la vie des affaires.

C’est ainsi que l’article 85 bis du DOC prévoit une prescription de 3 ans pour les  actions à l’encontre des instituteurs et des fonctionnaires du service de la jeunesse et des sports pour le dommage causé par les enfants et jeunes gens pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance à partir du jour ou le fait dommageable ait été commis.

De même l’article 106 du DOC édicte une prescription quinquennale pour l’action en indemnité du chef d’un délit ou quasi-délit à partir du moment ou la partie lésée a eu connaissance du dommage et de celui qui est tenu d’en répondre, éventuellement d’une prescription de 20 ans, qui se prescrit à partir du moment ou le dommage a eu lieu[24]. Toutefois, la chambre des conseillers a adopté le Mardi 8 Janvier 2019 lors d’une séance plénière à l’unanimité, l’article 106 précité qui dispose ainsi que : « L’action pour indemnisation suite à un délit ou un quasi délit se prescrit par cinq ans, à l’exception de procès pour indemnisation causés par les explosions de mines, dont le délai de prescription est fixé à 15 ans ». Aussi bien, l’article 311 du DOC énonce une prescription d’un an pour l’action en rescision. Ce temps ne court dans le cas de la violence que du jour ou elle a cessé, dans le cas d’erreur ou de dol, du jour ou ils ont été découverts[25].

En outre, l’article 855 du DOC édicte une prescription de six mois pour les actions du préteur contre l’emprunteur. Ce délai commence, pour le préteur, à partir du moment ou la chose lui est restituée, et, pour l’emprunteur, du moment ou le contrat a pris fin.

L’article 391 du DOC prévoit une prescription de cinq ans pour les actions en paiement de loyers, fermages, redevances, pensions, arrérages et généralement de tout ce qui est payable par année ou par termes périodiques plus courts[26].Si la prescription des dettes périodiques a été fixée à cinq ans dans le DOC, ce qui est alors beaucoup plus court que le délai de droit commun, c’est afin de protéger le débiteur contre l’accumulation des arrérages[27]. On trouvera dans le Code des obligations et contrats d’autres actions qui se prescrivent en un mois[28], 365 jours[29], 2 ans et 5 ans[30].

Traditionnellement, c’est également une courte prescription (prescription quinquennale) qui régit les actions nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants.

Cependant, il existe d’autres dispositions qui réglementent la prescription en matière commerciale. Le législateur a prévu des règles spéciales quant à la prescription de la lettre de change, qui sont distinctes des dispositions légales énumérées dans le code de commerce, ainsi que dans le code des obligations et contrats, et a décidé une prescription plus courte pour les actions cambiaires résultant de la lettre de change. Ce sont des actions exercées par tout porteur d’une lettre de change valable contre un signataire : le tiré accepteur, le tireur, un endosseur, un avaliseur, un accepteur par intervention, ou par celui qui a payé contre l’un de ces signataires[31]. Les délais varient selon la nature des actions. Toutes les actions contre l’accepteur se prescrivent par trois ans à compter de la date de l’échéance[32], les actions du porteur contre le tireur et les endosseurs se prescrivent par un an à partir de la date du protêt dressé en temps utile ou de celle de l’échéance, en cas de clause de retour sans frais[33], les actions des endosseurs les uns contre les autres et contre le tireur se prescrivent par six mois à partir du jour ou l’endosseur a remboursé la lettre ou du jour ou il a été lui-même actionné[34]. Il s’agit aussi bien des actions en paiement d’un billet à ordre et les recours se prescrivent comme ceux d’une lettre de change[35]. Alors que les obligations provenant du chèque se prescrivent en durées plus courtes que celles provenant de la lettre de change[36].

On trouve d’autres lois qui règlementent la prescription, parmi ces lois, le droit maritime[37], le droit des assurances[38] et le droit des sociétés[39].

La jurisprudence a depuis longtemps admis la validité des clauses abrégeant les délais de prescription. Il existe cependant, une théorie qui distingue entre la prescription à long terme et la prescription à court terme. Pour la première, il est possible et admissible d’abréger le délai, par contre, pour la seconde, il n’est point possible de l’abréger car les délais courts s’expliquent souvent par le souci de protéger le débiteur.

L’article 373 du DOC énonce que : «On ne peut d’avance renoncer à la prescription. On peut renoncer à la prescription acquise ».  Il est inconcevable de renoncer par avance à une prescription, ou de l’allonger tant que celle-ci ne s’est pas réalisée[40]. Cette prohibition émane du législateur en raison de sa contrariété au fondement de la prescription, et aussi, pour ne pas donner naissance à des contrats d’adhésion auxquels les créanciers obligeront aux débiteurs de consentir à la renonciation anticipée à la prescription insérée dans ces contrats.

Par cette protection du débiteur, la loi prend également en compte l’intérêt général d’éviter la négligence des créanciers. Etant une règle d’ordre public, la violation de cette prohibition des renonciations anticipées est sanctionnée par la nullité. Et ainsi, il est possible d’en réduire la durée[41] par un accord de volontés. Les clauses allongeant le délai légal de la prescription, sont interdites puisqu’elles constituent une renonciation partielle au bénéfice d’une prescription future, ces clauses, convenues lors de la conclusion du contrat, sont visées par la prohibition de l’article 373 du DOC.

Mais peut-on allonger le délai ? Cette question reçoit traditionnellement une réponse négative, déduite de l’article précité. En tous cas, la prohibition doit être atténuée par un raisonnement analogue à celui qui concerne la renonciation au bénéfice du temps déjà écoulé par une renonciation interruptive de prescription.

Le régime actuel de la prescription dans le dahir formant code des obligations et contrats présente, une durée excessive du délai de quinze ans car cette durée parait inadaptée aux besoins du monde moderne. Ses longueurs exorbitantes ont pour cause l’inertie de l’activité humaine. Il est incompréhensible que la prescription de droit commun soit encore aujourd’hui d’une durée de quinze ans. Il importe de faire appel à une abréviation des délais. Pourtant, il existe une multiplicité des délais, allant d’un mois à quinze ans, et même à l’imprescriptibilité, en passant par toutes sortes de délais intermédiaires (six mois, un an, deux, trois, cinq, quinze ans) une vrai confusion, et même un grand désordre, source d’ignorance du droit et d’interminables discussions.

La prescription, qui devrait être un élément de pacification des rapports humains et de leur dynamisme, est ainsi devenue en raison de sa longueur exorbitante, de sa multiplicité et de ses ambigüités une cause de stagnation de l’activité et une source abondante de litiges.

Le délai de droit de commun est de dix ans en Belgique et de cinq ans en France, ce qui marque un écart accru par rapport à ce qui existe dans le DOC. En élargissant l’examen à d’autres droits européens, on remarque que la Suisse et l’Italie ont choisi le même délai que la Belgique[42], tandis que les Pays-Bas ont opté pour le délai de 5 ans et l’Allemagne pour celui de 3 ans conformément à ce que préconisent les principes du droit européen du contrat[43].

Cependant, il existe un très grand nombre de délais spéciaux « prescriptions particulières » qui furent créées pour éviter le délai de quinze ans jugé trop long dans de nombreux domaines et dénoncé excessif et anachronique.

Pourtant, la justification de ces délais spéciaux est souvent douteuse[44] et peuvent s’avérer dangereuses, ce n’est pas tant en raison de la brièveté de leur délai que par le fait qu’elles sont méconnues de la plupart des justiciables. Il n’est d’ailleurs pas sur que le mécanisme même de la prescription des actions soit connu par le justiciable, lequel n’en apprend l’existence qu’à l’occasion du contact pris avec un avocat, et à un moment ou ses droits sont peut-être déjà éteints. Ce qui crée actuellement une véritable insécurité, en étant souvent mal informés.

  • Le point de départ du délai de prescription extinctive

Le principe est que le point de départ du délai de prescription est, non le jour ou la créance est née, mais celui ou le créancier peut agir[45]. Autrement dit, la prescription ne court qu’à compter du jour ou celui contre lequel on l’invoque a pu agir valablement[46].  Le point de départ est suffisamment objectif pour apaiser le débiteur, contrarié de connaitre le moment auquel commence à courir le délai à l’expiration duquel il sera libéré, mais ne sacrifie pas pour autant le créancier.

Le point de départ du délai à l’expiration duquel une action en paiement ne peut plus être exercée, se situe à la date d’exigibilité de l’obligation qui lui a donné naissance. En matière de découvert en compte bancaire, le délai court à compter de la date à laquelle le solde débiteur du compte est devenu exigible. Quant à la prescription de l’action en remboursement dirigée contre l’emprunteur défaillant court à compter de l’échéance impayée. Car c’est bien seulement à compter de cette date d’exigibilité qu’existe une possibilité d’action en paiement.

Pour les actions en nullité, elles se prescrivent en principe à compter du jour ou l’acte irrégulier a été passé. En effet, le point de départ de l’action en rescision pour lésion est la levée d’option et non le jour de la conclusion de la promesse[47]. Lorsque le contrat de vente est financé par un prêt immobilier qui s’est fait annulé, la prescription de l’action en nullité du contrat de prêt court à compter du jour de l’annulation de la vente, et non du jour de la connaissance du dol ayant affecté la validité de la vente. C’est en effet à cette seule date que l’action en nullité du prêt devient effectivement possible. Il est vrai que la possibilité d’action coïncide avec la réunion des conditions de l’action, il faut en même temps admettre le report du point de départ lorsque cette coïncidence fait défaut.

N’est-il pas naturel de retarder l’écoulement du temps lorsque le créancier est dans l’impossibilité d’agir malgré la réunion des conditions d’action ? Dans ce mécanisme spoliateur des droits du créancier qui constitue la prescription extinctive, peut-on aller jusqu’à dépouiller un créancier désarmé ? Évidemment non.

Cette impossibilité d’action trouve sa parfaite traduction dans l’adage Contra non valentem agere non curril praescriptio[48]. Aussi le point de départ devra-t-il être reporté en cas d’empêchement résultant de la loi, de la convention, de la force majeure ou d’ignorance du créancier[49].

A titre d’exemple, on peut d’abord rappeler que l’article 311 du DOC ne fait la prescription d’un an de l’action en rescision que du jour ou l’erreur et le dol ont été découverts[50]. Dans la même veine, l’article 573 du DOC fixe le point de départ du délai de l’action résultant des vices rédhibitoires de la découverte du vice[51].

Ainsi, lorsque la créance contractuelle a pour cause un manquement par une partie à l’une de ses obligations, le point de départ de la prescription se situe au jour de ce manquement. Cette solution repose notamment sur l’idée que la responsabilité contractuelle tend moins à la réparation d’un dommage qu’à la sanction de l’inexécution d’un contrat.

La Cour de Cassation (auparavant la cour suprême) a rendu un arrêt par lequel, elle déclare que : « le point de départ de la prescription quinquennale énoncée par l’article 106 du DOC prend effet à partir de la date de la connaissance du dommage et du responsable de ce dommage. Il incombe à l’assureur qui prétend que la victime connaissait le responsable d’en apporter la preuve. Il ne suffit pas pour prouver la connaissance de se baser uniquement sur les déclarations de la victime se trouvant à l’hôpital[52] ».

En matière d’assurances, toutes les actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux ans à compter de l’événement qui y donne naissance. En cas de sinistre, que du jour ou les intéressés en ont eu connaissance, s’ils prouvent qu’ils l’ont ignoré jusque-là. La prescription d’une action en responsabilité ne court qu’à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance[53] ou encore que le point de départ de la prescription biennale de l’action en responsabilité contractuelle exercée contre l’assureur se situe au jour ou l’assuré a connaissance du manquement de l’assureur à ses obligations et du préjudice en résultant pour lui[54].

 Cela témoigne parfaitement de la charge de la preuve que l’on fait peser sur le créancier et que la jurisprudence se montre relativement stricte en la matière et n’accepte le report du point de départ qu’en cas d’impossibilité légitime et absolue.

Le but est de rassurer le débiteur en fixant un point départ de la prescription aussi objectif que possible sans pour autant sacrifier le créancier empêché ou ignorant. Néanmoins, l’intérêt du débiteur plaide en faveur d’un point de départ précoce et surtout fixe, qui lui permet de prévoir le moment ou il sera en principe libéré et de prendre ses dispositions en conséquence. Un tel point de départ parait donc adapté aux longues prescriptions.

B- La modulation de la prescription

Il importe de distinguer ici les deux mécanismes de modulation de la prescription : sa suspension (a), son interruption (b).

  • La suspension de la prescription

La suspension marque un temps d’arrêt dans le cours de la prescription, le temps acquis avant la suspension demeurant en réserve pour s’ajouter à celui qui suivra la fin de la suspension. Si la cause de suspension se produit en début de délai, elle empêche celui-ci de commencer à courir.

Ainsi, on peut définir également la suspension comme « un arrêt temporaire du cours de la prescription en faveur de certaines personnes (mineures, majeures en tutelle) ou entre certaines personnes (entre époux) ou pour diverses causes déterminées par la loi[55] ». Elle est définie par l’article 2230 du Code Civil Français, issu de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, comme arrêtant temporairement le cours de la prescription, sans effacer le délai déjà couru.

Pour cela, nous procèderons à une analyse des causes classiques de suspension, avant d’en analyser les modernes.

Les causes classiques de suspension : Les articles 378, 379 et 380 du dahir formant Code des obligations et contrats prévoient un certain nombre d’hypothèses ou la prescription est suspendue.

Il s’agit d’abord des époux pendant la durée du mariage. L’article 378 du DOC dispose que la prescription est suspendue entre époux, le législateur a entendu favoriser la stabilité de l’union conjugale et éviter la détérioration des relations que risque de créer une action en justice intentée durant le mariage. Le but est d’assurer la stabilité des familles[56].

Le père ou la mère et leurs enfants, la prescription est également suspendue lorsqu’il s’agit des personnes précitées, tel qu’il a été énoncé dans l’article 378 du DOC.

L’incapable, le habous ou autre personne morale, et le tuteur, curateur ou administrateur, tant que leur mandat n’a pas pris fin et qu’ils n’ont pas définitivement rendu leurs comptes. Il s’agit de suspendre le cours du délai de prescription pour protéger les personnes en état d’incapacité, les majeurs en tutelle, les majeurs sous curatelle … tel indiqué dans l’article précité.

L’article 379 du DOC énumère également, les personnes assujettis à la suspension de la prescription, parmi eux les mineurs non émancipés, les incapables sans tuteur, dans un but est celui de leur fournir une protection quelque soit la durée de prescription.

L’article 380 du DOC dans ses alinéas 4 et 5 énonce, d’autres causes de suspension[57], qui relève de l’appréciation souveraine du juge de voir s’il y’a raison ou non de considérer la suspension, et qui n’est absolument pas soumise au contrôle de la cour de cassation.

Les personnes dénuées de capacité juridique, les mineurs, les interdits et les différents incapables ne jouissent pas de la capacité juridique d’agir mais leur incapacité n’est pas perpétuelle ou définitive. Quand ces personnes sont dotées d’un tuteur ou d’un représentant légal ou judiciaire conformément à leur statut personnel, la prescription biennale court à leur encontre comme à l’égard des sujets de droit doués de leur pleine capacité juridique. Inversement, quand elles n’ont pas de tuteur, elle est suspendue jusqu’à leur émancipation, majorité ou à la nomination d’un tuteur pour les représenter, conformément à l’article 379 du DOC.

Les causes modernes de suspension : La loi du 17 Juin 2008 consacre légalement l’adage  dans son article 2234 du Code Civil[58] comme étant une cause de suspension ou comme une cause de report de son point de départ. Ainsi, le texte reprend l’attendu de principe de la cour de cassation française ayant consacré l’adage. Toutefois, le législateur marocain ne l’a semble-t-il pas consacré jusqu’à présent.

Contra non valentem agere non currit praescriptio : la prescription ne court pas contre celui qui a été empêché d’agir. Cet adage, formulé en latin, est l’œuvre de BARTOLE au 14e siècle. Il a, par ces mots, essayé de synthétiser l’esprit qui commandait, dès le droit romain le procédé de restitutio in integrum.

Ce moratoire judiciaire revient à l’idée générale qui inspire également les moratoires légaux, c’est-à-dire que les délais ne sauraient s’appliquer de façon toute rigoureuse et objective.[59]

Malgré l’application constante de cet adage, le droit Marocain ne l’a jamais consacré légalement, au contraire de certains droits étrangers[60]. L’article 380 du DOC semble, en outre,  énumérer limitativement les causes de suspension des délais. Le législateur Marocain a refusé de prendre un texte car, ce faisant, il aurait objectivé la règle, car le risque serait que les parties y voient désormais un véritable droit ouvert à leur profit.

L’adage ne sert que comme une soupape de sécurité, souligna Jean Carbonnier[61]. Il est considéré comme une exception et non un principe d’appréciation. En effet, l’adage ne peut être invoqué que s’il y a impossibilité d’agir de fait, et non de droit, qui doit se manifester en fin de délai.

Il est possible de se demander si l’adage peut être assimilé à une cause générale de suspension ou plutôt à un allongement automatique et aveugle du délai[62]. Les conditions d’application de l’adage nous amènent à le distinguer nettement d’une cause de suspension[63]. La régulation permet d’assouplir les délais fixés objectivement, de les concrétiser. Il s’agit d’une mesure de grâce[64].

Le choix de la suspension plutôt que de l’interruption peut étonner dans la mesure où il y a bien réveil du créancier. La frontière est parfois délicate à établir entre ce qui mérite suspension ou interruption.

  • L’interruption de la prescription

La prescription vise à éteindre un droit qui n’a pas été exercé pendant longtemps. Elle suppose dès lors que le créancier s’abstienne d’exercer son droit pendant un certain délai.

Lorsque, loin de rester inactif, ce dernier pose certains actes juridiques pour exercer son droit ou si l’existence de ce droit est reconnue par celui contre qui il est invoqué, la prescription est interrompue. Le cours de la prescription s’arrête et le temps déjà écoulé est perdu. Un nouveau délai de prescription, en principe égal à l’ancien, commence à courir[65]. Autrement dit, l’interruption met fin au cours de la prescription de sorte que le temps écoulé de son délai avant l’avènement de la cause d’interruption ne joue plus dans le calcul du délai. Après la disparition de la cause de l’interruption, le délai recommence à courir en totalité.

La prescription peut être interrompue soit par des actes émanant du titulaire du droit menacé qui exerce son droit en justice, soit par une reconnaissance de l’existence de ce droit par le débiteur.

L’effet interruptif de la citation en justice est précisé dans ses conditions et dans son étendue, ce qui permet de clarifier les termes utilisés et de consacrer les acquis jurisprudentiels.

  • Conditions

La notion de citation visée à l’article 381 du DOC n’est pas à comprendre au sens strict du terme. Elle vise l’acte par lequel une personne introduit une demande en justice tendant à faire reconnaitre son droit[66].

L’article 381 du Dahir formant Code des Obligations et Contrats dispose que :

« La prescription est interrompue :

 1° Par toute demande judiciaire ou extra-judiciaire ayant date certaine qui constitue le débiteur en demeure d’exécuter son obligation, même lorsqu’elle est faite devant un juge incompétent ou que l’acte est déclaré nul pour vice de forme ;

 2° Par la demande d’admission de la créance à la faillite du débiteur ;

3° Par un acte conservatoire ou d’exécution entrepris sur les biens du débiteur, ou pour toute requête afin d’être autorisé à procéder à un acte de ce genre ».

La prescription peut être interrompue par la désignation d’un expert à la suite d’un sinistre. Cette cause s’explique par la nécessité d’un temps plus ou moins long pour la réalisation de l’expertise et par conséquent l’évaluation des dommages provoqués par le sinistre. Généralement ce délai est fixé par le juge en cas de recours judiciaire et par les parties en cas d’accord amiable. En cas d’insuffisance à cause de difficultés diverses, il peut être prolongé dans les mêmes formes. Il est normal que la prescription reporte le point de départ du délai à la date ou l’expertise devient définitive.

La prescription est également interrompue par toutes les causes ordinaires qui justifient l’arrêt de son cours, notamment l’envoi, par l’assureur à l’assuré, d’une lettre recommandée avec accusé de réception, pour le paiement de la prime, ou l’envoi inverse par l’assuré à l’assureur pour le règlement de l’indemnité. Il va de soi que l’exercice d’une action judiciaire, même devant une juridiction incompétente, constitue aussi un facteur d’interruption de la prescription.

Le législateur Marocain a souligné que même les actes conservatoires interrompent la prescription[67]. En effet, l’interruption ne vaut que jusqu’au jour ou le juge des référés aura rendu son ordonnance. Le droit comparé nous enseigne que l’effet interruptif est parfois conditionné[68].

Cependant, l’acte par lequel un débiteur se voit notifier un titre exécutoire, par exploit d’huissier, est interruptif de prescription conformément aux dispositions de l’article 381 du DOC dans son troisième alinéa. Par cet acte, le débiteur est mis en demeure d’exécuter l’obligation faisant l’objet du titre exécutoire, sous peine d’y être contraint par toutes voies de droit et notamment la saisie de ses biens[69].

En outre, comme il été précédemment cité, le législateur a dès lors accordé à la saisie le même effet interruptif que la demande judiciaire ou extra judiciaire[70]. Qu’elle soit exécutoire ou conservatoire, la saisie interrompt la prescription car dans les deux cas, le créancier manifeste sa volonté formelle de se faire payer.

L’article 382 du DOC prévoit que : « La prescription est également interrompue par tout acte par lequel le débiteur reconnaît le droit de celui contre lequel il avait commencé à prescrire… ».

Lorsque le débiteur reconnait l’existence du droit de son créancier, il épargne ainsi, à ce dernier, de devoir introduire une procédure pour faire reconnaitre l’existence de son droit non contesté en l’espèce. Cette cause d’interruption correspond, en réalité, à l’exercice, par le débiteur, de la faculté de renoncer au temps déjà couru de la prescription qui lui est accordée par l’article 373 du DOC.

De plus, les délais sont interrompus même en cas de demande devant une juridiction incompétente car il ne faut pas que les justiciables supportent les méandres de l’organisation judiciaire[71]. Cela signifie qu’une action en justice portée même devant un tribunal incompétent interrompt la prescription jusqu’au prononcé du jugement.

Partie II : La forclusion

Les Pandectes Belges nous rappellent que le terme forclusion dérive du latin « forum claudere », c’est-à-dire « fermer le barreau », et le définissent comme « l’exclusion de faire en justice quelques actes, quelques productions, quelques contradictions, à défaut de les avoir faits dans le temps préfixé »[72].

Il importe de lever d’abord, un certain nombre d’incertitudes concernant la notion, et de proposer une définition du délai de forclusion tout en révélant sa profonde modernité, ensuite, de faire clairement le départ entre la prescription extinctive et la forclusion, en raison de leurs points communs et surtout de leurs différences, puis nous examinerons s’il existe une technique efficace pour les distinguer les uns des autres.

  • Notions et critère de distinction entre la forclusion et la prescription

La prescription extinctive et la forclusion sont deux institutions proches l’une de l’autre. Elles reposent toutes les deux sur l’inaction prolongée de celui contre qui le délai de forclusion ou de prescription court, et elles confirment l’affirmation selon laquelle le temps qui passe peut avoir des effets juridiques. Pourtant, ces deux institutions ne peuvent pas être confondues et elles doivent être définies différemment.

  • Notions : Deux institutions distinctes

La prescription est une institution universelle, qui a pour but de protéger et de consolider les patrimoines, et qui frappe également et indistinctement tous les droits subjectifs, alors que la forclusion est une sanction civile particulière, qui ne tend qu’à hâter l’accomplissement de certains actes. Le délai de prescription est en quelque sorte négatif, casuel, extrinsèque par rapport aux droits qu’il atteint : il ne fait partie d’aucune institution déterminée, le délai de forclusion, au contraire, est positif, essentiel : il fait partie d’une institution spéciale, et circonscrit les droits dont il entraine la déchéance[73].

Les délais de forclusions sont des délais plus stricts et rigoureux que ne le sont ceux de la prescription. La forclusion montre une autre utilisation du temps qui ne correspond plus aux fondements de la prescription[74].

Ainsi, on s’accorde pour reconnaitre aux délais de forclusion des éléments communs, précisément deux critères et deux éléments de son régime juridique :

  • Premièrement, les critères ont trait d’une part à la finalité des délais de forclusion conçus comme des délais pour agir, d’autre part à leur brièveté ;
  • Deuxièmement, les éléments du régime ont trait au fait que les délais de forclusion ne seraient susceptibles d’aucune interruption ou suspension et que le juge pourrait relever d’office la forclusion.

Autrement dit, la forclusion serait une notion fondamentalement définie à rebours en considération de l’impossibilité de l’interrompre ou de le suspendre et du pouvoir du juge de relever d’office son écoulement. Aussi, pour tenter de découvrir l’essence de la notion, on ne peut que partir de ses effets et donc d’une certaine réalité. On peut, dès lors, tenter de la distinguer de la prescription.

La prescription dépend largement de la volonté des parties, peut en effet être analysée comme un temps individuel qui s’adapte à notre conscience. Chacun peut interrompre le temps de prescription, le suspendre. La forclusion repose en revanche sur une logique arithmétique pure, faisant de ces délais une sorte de temps universel.

Les délais de forclusion sont de plus courte durée et non susceptibles de suspension et d’interruption, ils ne sont pas touchés par les événements suspensifs. La doctrine utilise cette rigueur du régime des délais de forclusion comme critère de qualification[75].

Alors que la prescription éteint le droit substantiel, la forclusion éteint l’action en justice. La forclusion est plus exactement un terme extinctif. Elle fixe un temps pour défendre en justice le droit contredit par le fait. Globalement, elle montre une utilisation plus rigoureuse du temps pour agir en justice. Ces traits façonnent une notion rigoureuse.

La forclusion est un délai proportionnellement court, considéré comme étant un intervalle de temps qui s’ouvre entre un point de départ et un terme, autrement dit une durée. Elle suppose donc la détermination d’un point de départ précis qui est le plus souvent fixé par le législateur. Les délais de forclusion ont pour trait commun une certaine brièveté. La plupart d’entre eux sont d’une durée comprise entre 3 jours et 1 an[76].

La forclusion est aussi bien un délai purement arithmétique, puisque la prescription reste soumise aux caprices de la volonté, tandis que la forclusion est considérée comme étant un délai arithmétique, une réalisation purement mathématique de l’écoulement du temps d’un point de départ à un terme que rien ne semble pouvoir arrêter.

La forclusion est donc un délai qui, dès lors qu’il court, ne cessera sa course que par l’arrivée de son terme ou la survenance d’un évènement particulier prévu par le législateur, ce qui rend de la forclusion une notion rigoureuse, puisqu’elle s’écoule en silence sans être altérée par les bruits du monde.

  • Critère de distinction

En cas de litige, il appartient alors au juge saisi de qualifier juridiquement le délai invoqué et de déterminer le régime qui lui est applicable. Pour cela, il doit utiliser un ou plusieurs critères de distinction.

Il faut tout d’abord se référer aux termes de la loi pour savoir si un délai est de forclusion ou, au contraire, de prescription, même si la loi ne fournit aucune ligne de conduite permettant de différencier la forclusion de la prescription. En d’autres termes, il faut toujours vérifier si le législateur ou les parties ont voulu attacher à l’expiration d’un délai le caractère d’une déchéance ou d’une prescription. Comme il faut examiner si son auteur a souhaité protéger la paix sociale et l’intérêt général en privant le créancier ayant tardé à agir de la possibilité d’encore le faire indéfiniment (la prescription) ou s’il a voulu éviter que la réalisation d’un acte déterminé ne soit pas trop postposée dans le temps (la forclusion).

La prescription est censée être plus longue que la forclusion. Cette dernière est considérée comme étant un délai d’apurement qui doit régler rapidement une situation donnée[77]. Tant que le législateur n’aura pas déterminé expressément la nature des différents délais, des incertitudes subsisteront. En effet, le régime de la prescription est moins dur pour le détenteur du droit qui a, au départ, vocation perpétuelle[78], en outre, la forclusion se rapporte à des actions que le législateur n’a ouvertes qu’à titre exceptionnel et comme à regret… tandis que ce sont les droits bienvenus et pleinement épanouis qui se prescrivent[79].

S’il est vrai que la forclusion est plus rigoureuse, les critères de distinction ne sont pas convaincants.

  • Le régime juridique de la forclusion

Comme nous l’avons indiqué précédemment, le droit Marocain ne contient aucune réglementation d’ensemble, claire et cohérente, des délais de forclusions. Cette insécurité juridique est d’autant plus regrettable que les effets juridiques que produit l’écoulement de la forclusion sont redoutables.

Nous constaterons également que malgré l’existence d’une certaine similitude entre la forclusion et la prescription, les différences de régime entre ces deux institutions sont loin d’être négligeables. Nous préciserons les effets que le droit Marocain reconnait à l’écoulement de la forclusion, et aussi bien, nous examinerons si ces délais peuvent être suspendus ou interrompus.

  • Les effets assignés à l’expiration de la forclusion

A la différence de la prescription qui n’affecte pas l’existence de la dette mais seulement son exigibilité et qui laisse subsister l’obligation comme une obligation naturelle, la forclusion ne laisse rien subsister, pas même une obligation naturelle[80]. Ainsi, lorsque le Maitre d’Ouvrage omet d’agir contre son entrepreneur dans le délai de dix ans prescrit par l’article 769 du DOC, l’entrepreneur n’est plus tenu de réparer les dégradations causées par le vices, que ce soit en vertu d’une obligation civile ou d’une obligation naturelle.

Ainsi, le non respect d’un délai de forclusion est une cause d’irrecevabilité de l’action intentée après l’écoulement dudit délai, une fin de non-recevoir. Autrement dit, lorsque la forclusion est imposée pour l’introduction d’une action en justice et que cette action est intentée après l’expiration du délai, le défendeur peut soutenir que le juge n’a pas le pouvoir d’examiner la demande pour défaut du droit d’agir. L’article 49 du Code de Procédure Civile dans son premier alinéa dispose que : «Les exceptions de litispendance et de connexité, ainsi que les exceptions aux fins de non-recevoir doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ». Cette action est irrecevable car le droit d’agir n’existe plus[81].

Les fins de non-recevoir doivent être soulevées in limine litis. Le temps est imposé pour des raisons de politique processuelle. La forclusion et la prescription ont le lien le plus évident avec le temps de l’action. Le principe voulant que l’exception soit perpétuelle n’a pas vocation à s’appliquer à la forclusion. L’irrecevabilité de la demande ou de l’exception constitue une fin de non recevoir qui peut être opposée en tout état de cause, même en cause d’appel.

Cependant, ce qui distingue la forclusion de la prescription n’est pas tellement l’irrecevabilité, trait commun aux deux notions, mais le rôle assigné au juge dans le contrôle de cette irrecevabilité. Le juge est dans l’obligation absolue de relever d’office l’irrecevabilité tirée de la forclusion.

Certes, la forclusion a vocation à déterminer le rapport de droit en le stabilisant ou en le faisant disparaitre par la survenance de son terme, mais il a aussi pour finalité de contraindre, par la menace qu’il fait peser sur le coactus, d’inviter celui-ci à agir pour préserver son droit. Plus que la prescription constitue un temps de l’oubli, la forclusion est un temps de révélation qui contraint le coactus à sortir le rapport de droit de l’incertitude.

  • Suspension et interruption de la forclusion

La forclusion ne saurait être interrompu ou suspendu. En d’autres termes, la suspension et l’interruption des délais de prescription ne s’appliquent pas aux délais de forclusions, qui sont des délais de rigueur. La règle de l’inapplicabilité aux délais de forclusions, des causes de suspension et d’interruption est rappelées dans la plupart des ouvrages traitant de ces délais de rigueur, reprise par les tribunaux du Royaume et aussi bien la Cour de Cassation.

Bien que le cours de la forclusion ne puisse en principe pas être suspendu ou interrompu, la loi, la jurisprudence majoritaires reconnaissent au juge le pouvoir de proroger les délais de forclusion pendant le temps nécessaire pour exercer un droit ou accomplir une formalité, lorsqu’un événement de force majeure a empêché le titulaire du droit d’agir dans le délai légal[82].

Prenons par exemple, le créancier qui n’a pas déclaré sa créance dans le délai fixé par l’article 72 de la loi 73.17[83], peut demander à être relevé de la forclusion sous certaines conditions. L’action en relevé de forclusion est réservée aux seuls créanciers ayant omis de déclarer dans le délai légal une créance antérieure ou postérieure au jugement d’ouverture et qui ne bénéficie pas des règles réservées aux créances liées aux besoins de la procédure ou à l’activité du débiteur.

Le créancier doit établir que sa défaillance n’est pas due à son fait, et qu’il s’est trouvé dans l’impossibilité d’agir. L’appréciation du juge commissaire est souveraine.  Il a été admis comme un motif de relevé de forclusion une altération des facultés cérébrales du créancier pendant la période ou il aurait du déclarer sa créance[84], ce motif pouvant être étendu à toute autre circonstance caractérisant un obstacle de force majeure ou un état de détresse psychologique avec état dépressif[85].

Il en déduit pour que le juge puisse accorder une telle prorogation, il faut que la personne qui n’a pas agi dans le délai prouve qu’un événement imprévisible, insurmontable et indépendant de sa volonté l’a empêchée de respecter le délai. S’il apparait que cette personne a fait preuve de négligence, elle ne pourra pas se prévaloir de la force majeure pour demander une prorogation dudit délai.

En effet, lorsque la force majeure empêche l’intéressé d’agir dans le délai de forclusion, le délai n’est pas prolongé de toute la durée de l’empêchement, il n’est pas suspendu. Il est prolongé du temps nécessaire pour permettre à l’intéressé d’agir. En conséquence, dès que la force majeure disparait, le bénéficiaire de la prorogation est tenu d’agir.

 

[1]  Pascal se demandait, d’ailleurs, « qui le pourra définir et pourquoi l’entreprendre, puisque tous les hommes conçoivent ce qu’on veut dire en parlant de temps, sans qu’on le désigne davantage ? Cependant, il y a bien de différentes opinions touchant l’essence du temps » (De l’esprit géométrique, Garnier-Flammarion 1985, p. 72).

[2]  Saint-Augustin, Les confessions, (vers 400), Livre XI, § XIV, trad. P. Cambronne, in Œuvres, t. I, La Pléiade, 1998, p. 1040-1041.

[3]  P. Hébraud, Observations sur la notion de temps dans le droit civil, in Etudes offertes à P. Kayser, PUAM, 1979, T II, p. 1 et suiv.

[4]  P. Malaurie, les libéralités graduelles et résiduelles, Paris, Défrénois, 2006, p. 1801.

[5]  P. Level, Essai sur les conflits de lois dans le temps, contribution à la théorie générale du droit transitoire, thèse, Paris, L.G.D.J. 1959, n°2.

[6]  G. Bollard, Rapport général, in Le temps dans la procédure, colloque organisé les 13, 14, 15 Novembre 1983, op. cit., p. 149, spéc. p. 152.

[7]  Voir M. Hauriou cité par P. Hébraud, la notion de temps dans l’œuvre du Doyen M. Hauriou, op. cit., p 193 et s.

[8]  S. –A. Mekki, le temps et le procès civil, Préface de Loic Cadet, Dalloz, p. 3.

[9]  Cadiet (L.), Normand (J.), Amrani-Mekki (S.), Théorie générale du procès, Thémis Droit PUF, 2e éd. 2013, p. 305.

[10]  Salas (D.), « Procès », in Dictionnaire de la culture juridique, dir. Alland (D.), Rials (S.), Lamy, PUF.

[11]  P. Hébraud, op. cit., spéc. n° 29, p. 50 : « on le ressent comme une gêne, une entrave, un facteur extrinsèque paralysant la réalisation des droits, une scorie de la vie du droit. Ce sentiment a pris une grande force à l’égard de la justice ; on dénonce sans cesse, et sans doute avec excès, ses lenteurs, et l’accélération de la procédure est devenue un thème majeur de tous les projets de réforme et de toutes les innovations législatives récentes » ; Voir également S. Guinchard, les solutions procédurales, in le temps dans la procédure, coll. Thèmes et commentaires, Dalloz, Paris, 1996, p. 51 et suiv., spéc. p. 52.

[12]  M. –A. Frison-Roche, « Principes et intendance dans l’accès au droit et l’accès à la justice », JCP éd. G n° 40, 1er Octobre 1997, 4051.

[13]  L. CADIET, E. JEULAND, Droit judiciaire privé, Paris, Litec, 5ème éd., 2006, p. 337.

[14]  G. Cornu Association Henri Capitant, Vocabulaire juridique, 10e édition, PUF, p. 792.

[15]  S. Amrani-Mekki, le temps et le procès civil, Préf. L. Cadiet, Nouvelle Bibliothèque de Thèses, ed. Dalloz, 2002, p 32.

[16]  L’article 371 du DOC dispose que : « La prescription, pendant le laps de temps fixé par la loi, éteint l’action naissant de l’obligation ».

[17]  G. Cornu Association Henri Capitant, op.cit.

[18]  V. P.-A. FENET, Recueil complet des travaux préparatoires du Code Civil, T.XV, spéc. P. 575.

[19]  Contra, D. Landraud, prescription et ordre public, Thèse Lyon, 1971.

[20] Toutes les actions naissant d’une obligation sont prescrites par quinze ans, sauf les exceptions ci-après et celles qui sont déterminées par la loi dans les cas particuliers.

[21]  L’article 5 du Code de commerce énonce que : « Les obligations nées, à l’occasion de leur commerce, entre commerçants, ou entre commerçants et non commerçants, se prescrivent par cinq ans, sauf disposition spéciale contraire ».

[22]  C’est vrai quand le délai est apprécié par le juge, comme le délai raisonnable pour rendre la justice, sans violer les droits fondamentaux des justiciables, le délai raisonnable prévu dans la Convention de Vienne pour dénoncer un défaut (article39.1), le délai de grâce que le juge fixera en fonction des données concrètes qui lui seront soumises, mais à l’intérieur des limites légales conformément à l’article 243 du DOC.

[23] Mamoun Kouzbari, la théorie des obligations à la lumière du code des obligations et contrats marocain, Tome II, p. 528.

[24] Nous évoquerons l’affaire de « la Société Rezk de transport » qui a pris une large ampleur et a connu l’intervention du président palestinien Yasser Arafat auprès de l’un des associés de ladite société qui portait la nationalité palestinienne et s’est plaint du fait que les droits de ce dernier ont été lésés, ce qui a déclenché l’action publique de la part du ministère public et du juge d’instruction, et a permis aux associés d’exercer l’action civile en même temps que l’action publique devant la juridiction répressive  bien que le délai de 15 ans fut dépassé, les droits civils n’ont pas été prescrits puisque que l’action publique ne s’est pas prescrite.

[25] L’article 312 du DOC : « Ce temps ne court, dans le cas de violence, que du jour où elle a cessé, dans le cas d’erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts, à l’égard des actes faits par les mineurs, du jour de leur majorité ; à l’égard des actes faits par les interdits et les incapables, du jour où l’interdiction est levée ou du jour de leur décès, en ce qui concerne leurs héritiers, lorsque l’incapable est mort en état d’incapacité; en cas de lésion, lorsqu’il s’agit de majeurs, du jour de la prise de possession de la chose qui fait l’objet du contrat ».

[26] L’article 392 du DOC prévoit une prescription quinquennale.

[27] On invoquait également une présomption du paiement et cette idée est mise en avant en droit italien pour justifier les prescriptions dites présomptives. Voir le rapport de R.M Morresi et A. Pozzato, n°18 à 21.

[28] Le délai pour intenter une action récursoire.

[29] Les articles 388 et 389 du DOC.

[30] L’article 388 du DOC.

[31] Cass. Com. 26-11-2003 n° 1612: RJDA 4/04 n°505.

[32] L’alinéa premier de l’article 228 du Code de Commerce.

[33] Le deuxième alinéa de l’article 228 du Code de Commerce.

[34] Le troisième alinéa de l’article 228 du Code de Commerce.

[35] L’article 234 du Code de Commerce.

[36] L’article 295 du Code de Commerce prévoit des durées de six mois et d’un an.

[37] La convention de Hamburg stipule une prescription biennale quand au Dahir du 31 Mars 1919, celui-ci dispose un délai d’un an en vertu des dispositions de l’article 262.

[38] L’article 36 du Code des assurances prévoit une prescription biennale.

[39]  La prescription quinquennale est la règle générale dans la loi 17-95 relative aux sociétés anonymes à l’exception des actions de nullité de la société ou de ses contrats qui se prescrivent d’un délai de 3 ans conformément aux dispositions de l’article 345.

[40] Le législateur interdit toute renonciation à la prescription avant le commencement du délai de prescription. Pa r contre, l’article 373 du DOC permet expressément la renonciation à la prescription après l’écoulement du délai de prescription.

[41] La double vertu d’inciter le créancier à plus de diligences, tout en permettant au débiteur de se libérer plus facilement.

[42]  V. D. Bouverat et P. Wessner, «Quelques questions choisies liées à la prescription extinctive en droit suisse » n° 11, 25.

[43]  L’article 14-101 : « Le délai de la prescription du droit commun est de trois ans ».

[44] Pourquoi, par exemple, l’assureur et le transporteur, qui sont des professionnels, bénéficient-ils de délais plus courts que le délai de droit commun ? Nous estimons que la raison est d’ordre politique, les intérêts des commerçants concernés ayant été bien défendus. Il faut aussi tenir compte du fait que certains délais résultant de contraintes extérieures.

[45]  L’article 380 du DOC dispose que : « La prescription ne court contre les droits que du jour où ils sont acquis; par conséquent, elle n’a pas lieu : 

1° En ce qui concerne les droits conditionnels, jusqu’à ce que la condition arrive ;

2° A l’égard d’une action en garantie, jusqu’à l’éviction accomplie ou la réalisation du fait donnant lieu à garantie ;

3° A l’égard de toute action dont l’exercice dépend d’un terme, avant que le terme soit échu ;

4° Contre les absents, jusqu’à la déclaration d’absence et la nomination du curateur : celui qui se trouve éloigné du lieu où s’accomplit la prescription est assimilée à l’absent ;

5° Lorsque le créancier s’est trouvé en fait dans l’impossibilité d’agir dans le délai établi pour la prescription».

[46] La prescription des droits résultant d’une convention commence à courir du jour ou ces droits ont pris naissance et ont pu être valablement exercés.

[47] En matière de promesse synallagmatique de vente, c’est la signature de l’acte authentique rendant la vente parfaite qui commence à faire courir le délai de l’action en rescision.

[48]  J. Carbonnier, la règle Contra non valentem agere non curril praescriptio, Rev. Criti. Législ. Et jur., 1937, p. 155.

[49]  On peut également sans doute considérer comme un empêchement résultant de la force majeure l’une des solutions de l’article 311 du DOC : le délai de prescription de l’action en rescision pour violence ne commence à courir que du jour ou la violence a cessé.

[50]  C’est la découverte de l’erreur et non simple soupçon qui fait courir le délai.

[51]  Cette prise de connaissance coïncide souvent avec la notification du rapport d’expertise établissant le vice.

[52]  Arrêt n° 1503 rendu le 11/06 /1986 dans le dossier n° 1837/84.

[53] La prescription d’une action en responsabilité résultant d’un manquement aux obligations nées du contrat de travail ne court qu’à compter de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance. ; Cass. Soc., 18 décembre 1991, Bull. civ. V, n°598.

[54] Cass. Civ. 2e, 11 Octobre 2007, inédit, pourvoi n°06-17822.

[55]  G.CORNU, V° « suspension », in Vocabulaire juridique, op. cit.

[56] L’union intime qui fait leur bonheur est si nécessaire à l’harmonie de la société, que toute occasion de la troubler est écartée par la loi.

[57] Alinéa 4 art 380 DOC : «Contre les absents, jusqu’à la déclaration d’absence et la nomination du curateur, celui qui se trouve éloigné du lieu ou s’accomplit la prescription est assimilé à l’absent »

Alinéa 5 art 380 DOC : « Lorsque le créancier s’est trouvé en fait dans l’impossibilité d’agir dans le délai établi pour la prescription ».

[58] La prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.

[59] J. Carbonnier, la règle contra non valentem, Rev. Crit, 1937,pp. 155 et s. : « A la prescription, institution fondée sur le temps, il s’est efforcé de donner un cours non point uniforme, mais variable suivant la diversité concrète des situations ; et en faveur de ceux pour qui le temps est passé trop vite, il veut que la prescription dure plus longtemps ».

[60] Plusieurs autres Etats ont introduit cette règle dans leur législation : l’article 134 du Code Suisse des Obligations, ainsi que l’article 203 du Code Civil Allemand, la Grèce, le Portugal, l’Autriche, les Pays-Bas, et l’Italie.

[61] J. Carbonnier, op. cit, p.171 et s.

[62] M. Buy, Prescriptions de courte durée et suspension de la prescription, JCP G., 1977, I, 2833, n°23 et s.

[63]  P. LE TOURNEAU et L. CADIET, Droit de la responsabilité, Dalloz Action, 1998, spéc. n° 1129, p.354.

[64]  Ibid.

[65] M. Regout-Masson, « La prescription en droit civil », in la prescription, Formation permanente CUP, Liège, 1998, vol.23, p. 51.

[66]  M. Marchandise, « la prescription libératoire en matière civile », Bruxelles, Larcier, 2007, pp. 117-123.

[67]  Une requête afin de saisie-arrêt interrompt la prescription.

[68]  Ainsi, la citation en référé n’a un effet interruptif en Angleterre, aux Pays-Bas ou en Belgique que si une demande au fond est formée en même temps.

[69] M. Marchandise, la prescription libératoire en matière civile, Bruxelles, Larcier, 2007, p.134.

[70]  Article 381 do DOC.

[71]  R. –J. Pothier, les obligations, spéc. n° 662.

[72]  Pandectes Belges, t. 28, v° Déchéance, Bruxelles, Larcier, 1888, p. 231, n° 3.

[73]  H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. VII, op. cit., p. 1032. Dans le même sens, J.P. Namur, 28 Juin 1968, J.L., 1968-1969, p. 169.

[74]  Voir sur ce point Soraya Amrani-Mekki, op. cit., p. 42.

[75]  V.G. Viney et P. Jourdain, traité de droit civil, les conditions de la responsabilité, 2e éd., L.G.D.J., 1998, spéc. n° 777, p. 773. V. infra n° 52.

[76]  A titre d’illustration :

  • Délais en jours: Contestation électorat (Article 453 du Code du Travail) = 8 jours ; stipulation pour autrui (Article 36 du DOC) = 15 jours ; rétention des objets (Article 297 du DOC) = 30 jours ; le droit d’option (Article 604 du DOC) = 60 jours pour les immeubles urbains et les fonds de terre et 5 jours pour les animaux domestiques et toutes les choses mobilières ; contestation solde de tout compte (Article 75 du Code du Travail) = 60 jours ; droit de retrait (Article 974 du DOC) = 3 jours ; défaut de paiement des loyers ou bien sur le fait que le local est menaçant ruine (Article 26 de la loi 49-16) = 15 jours ; action en justice concernant le licenciement (Article 65 du Code du Travail) = 90 jours, exercice du droit de préférence par le bailleur (Article 25 de la loi 49-16) = 30 jours ; droit d’exercice du retrait (Article 304 de la loi 39-08) = 30 jours ;
  • Délais en mois: Revendication des meubles dans les entreprises en difficulté (Article 667 du Code de Commerce) = 3 mois ; déclaration de créance dans le cadre des entreprises en difficulté (Article 687 du Code de Commerce) = 2 mois ; reprise du local pour usage personnel, pour démolition et reconstruction, pour extension et surélévation, ou pour un motif sérieux relatif à l’inobservation par le locataire des clauses du bail (Article 26 de la loi 49-16) = 3 mois, demande de validation du congés (Article 26 de la loi 49-16) = 6 mois ; toute personne prétend à un droit sur un immeuble en cours d’immatriculation (Article 24 de la loi 14-07) = 2 mois à partir de la publication au bulletin officiel de l’avis de clôture du bornage, A prendre en considération l’exception prévue par l’article 29 de ladite loi ; le recours contre la décision rendue par le conservateur foncier concernant le refus de l’immatriculation (Article 10 de l’arret ministériel daté du 3 Juin 1915) = 1 mois à partir de la réception de ladite décision ;
  • Délais en années : Droit d’exercice du retrait (Article 304 de la loi 39-08) = 1 an à partir de la date de l’inscription de la vente au titre foncier ou du dépôt du dossier d’immatriculation ; 4 ans à partir de la date de conclusion du contrat dans le cas ou il n y’a pas eu connaissance de la vente ; annulation, modification ou radiation d’un droit réel sur le titre foncier (Alinéa 2 Article 2 de la loi 39-08) = 4ans ;

[77]  A. Outin-Adam, Essai d’une théorie des délais en droit privé, contribution à l’étude de la notion de temps par le droit, Thèse Paris II, 1985,

[78]  M. Marchandise, la prescription libératoire en matière civile, p. 35, note 123.

[79]  F. Glansdorff, le caractère imprescriptible des exceptions, R.C.J.B., 1991, p. 283, n° 11.

[80]  H. De PAGE, traité élémentaire de droit civil belge, t. VII, op., p. 1033.

[81]  G. GLOSSET-MARCHAL, Exceptions de nullité, fins de non recevoir et violation des règles touchant à l’organisation judiciaire, op. cit., 1995, p. 651.

[82]  Alinéa 3 de l’article 690 de l’ancien livre V Code de Commerce, Alinéa 3 de l’article 723 de la loi 73.17.

[83]  Article 687 de l’ancien livre V du Code de Commerce.

[84]  C.A Toulouse, 21 nov. 2001, RD bancaire et financier 2002, p. 133.

[85]  C.A Colmar, 20 janv. 2004, RD bancaire et financier 2004, p. 253.

مقالات ذات صلة

زر الذهاب إلى الأعلى