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Sociologie, psychologie et psychosociologie de l’impôt – Docteur : Jilali Chabih

Sociology, psychology, and psychosociology of taxation.

Sociologie, psychologie et psychosociologie de l’impôt

Sociology, psychology, and psychosociology of taxation.

Docteur : Jilali Chabih

PES – UCAM – Maroc

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ملخص:

تشكل الاقتطاعات الضريبية، أو النظام الضريبي بصفة عامة، المصدر الرئيسي لتمويل معظم الاقتصاديات العمومية، سواء بسبب ندرة الموارد الأخرى أو بسبب سوء إدارة الشأن العام⸳ وتأسيسا على هذه الأهمية الكبرى التي تتمتع بها الظاهرة الضريبية، خطأ أو صوابا، فإنها تحتل مفترق الطرق لجميع العلوم الاجتماعية، سواء تعلق الأمر بالاقتصاد، أو بالتدبير، أو بالقانون، أو بالتاريخ، أو بالجغرافيا، أو بالفلسفة، أو بالسياسة، أو بعلم الاجتماع، أو بعلم النفس، أو بعلم الاجتماع النفسي. وبالنظر إلى الجوانب السوسيولوجية والسيكولوجية والسوسيو- سيكولوجية، لهذا النوع من الموارد فإنه يتضمن بشكل أساسي عدة متغيرات ذات الطابع الاجتماعي والسلوكي والمؤسساتي والأكسيولوجي والأسطوري.

Résumé :

L’impôt, la fiscalité ou le système fiscal de manière générale, représente la principale source de financement de la majorité des économies publiques, que ce soit à cause de la pénurie ou de la rareté d’autres ressources, ou à cause d’une mauvaise gestion de la chose publique. En raison de cette grande importance, à tort ou à raison, l’impôt se situe au  carrefour de toutes les sciences sociale, que ce soit l’économie, la gestion, le droit, l’histoire, la géographie, la philosophie, la politique, la sociologie, la psychologie ou la psychosociologie. Envisagée sous ses aspects sociologiques, psychologiques et psychosociologiques, la fi scalité engage foncièrement plusieurs variables d’ordre social, comportemental, institutionnel, axiologique et mythologique.

Abstract:

Taxation or the tax system in general, represents the main source of financing for most public economies, whether because of the scarcity of other resources or because of poor management of the public thing. Because of this great importance, rightly or wrongly, taxation is at the crossroads of all the social sciences, be it economics, management, law, history, geography, philosophy, politics, sociology, psychology, or psycho-sociology. Considered in its sociological, psychological, and psycho-sociological aspects, taxation fundamentally involves several variables of a social, behavioral, institutional, axiological, and mythological order.

La sociologie est l’étude scientifique des sociétés humaines et des faits sociaux. Elle s’intéresse à l’organisation, au fonctionnement et à la transformation des sociétés de par tout phénomène social : action, relation et représentation[1]. Ainsi la sociologie de l’impôt ou la sociologie fiscale, ou encore, et d’une manière générale, inclusive, la sociologie financière, dans la mesure où la fiscalité est une source de financement, serait-elle la branche de la sociologie qui étudie la finance et la science financière en tant que phénomène social[2] ayant pour objet le financement dans toute sa globalité, dans toute sa complexité (sources, dépenses, acteurs, projets, gestion, économie, intermédiation…).

La sociologie de l’impôt, dans toute l’acception du terme, a pour objet l’étude des faits fiscaux[3] sous leurs aspects sociaux[4]. La psychologie est l’étude scientifique des comportements et des phénomènes de sensibilité, d’intelligence et d’activité[5], lesquels sont étroitement liés aux phénomènes sociaux et comportementaux de développement humain, ce qui n’exclut nullement un état d’esprit, une mentalité et un mode de pensée et d’agir financièrement et fiscalement parlant[6].

La psychologie sociale, ou la psychosociologie, est l’interaction inextricable entre les faits psychologiques et les faits sociaux. Transposée sur le plan financier et fiscal, la psychosociologie de l’impôt serait l’ensemble des conduites des contribuables et redevables à l’égard du phénomène fiscal. On pourra ainsi parler de la décision du contribuable, du civisme fiscal ou du respect de l’obligation fiscale et du soutien tacite aux pouvoirs en place, d’évitement de l’impôt et / ou de la fraude fiscale, de la résistance à l’impôt et de la demande davantage de services publics puisqu’ils sont financés par l’impôt[7].

Il y a donc forcément corrélation entre aspects sociologiques, psychologiques et psychosociologiques de tout phénomène organisationnel. Ce qui, par conséquent, nous amène à considérer ces trois aspects dans leur rapport à l’impôt.

  • 1 – La sociologie de l’impôt

La sociologie de l’impôt qui a pour objet l’étude des faits fiscaux sous leurs aspects objectivement sociaux, comprend l’institution fiscale, les forces politiques et les structures sociales[8].

A – L’institution fiscale

Sous cette notion on étudiera les sources du droit fiscal, l’administration fiscale et le cadastre. Les sources du droit fiscal sont d’ordre interne, international et interprétatif. Les sources internes (droit fiscal interne : national et territorial) comprennent la règle fiscale (constitutionnelle, législative, réglementaire), la jurisprudence (décisions des tribunaux et cours), la pratique et la doctrine administratives (commentaires, instructions de base, notes, lettres, circulaires…) et la doctrine académique (travaux et notes des fiscalistes)[9].

Les sources internationales (droit fiscal international) se rapportent aux conventions bilatérales (lutte contre l’évasion fiscale internationale, évitement des doubles impositions, paradis fiscaux, dépenses de guerre), et aux traités multilatéraux (abaissement ou suppression des barrières douanières, territorialité de l’impôt et établissement stable, harmonisation des législations fiscales, fuite des capitaux).

Les sources interprétatives consistent dans les règles générales d’interprétation de la loi fiscale données par l’administration, par le juge, ou par la doctrine, que ce soit l’interprétation de la loi fiscale interne ou internationale[10].

L’administration fiscale est, en l’occurrence, d’une importance primordiale[11], G. Ardant notait à ce propos : « on a trop souvent tendance à oublier que le système fiscal le mieux conçu ne vaut que par l’administration qui le met en place [12]». Aussi l’étude de l’administration requiert-elle l’examen des organes, des fonctions, des moyens technologiques et des rapports.

Les organes comprennent les organes de décision au sein de la Direction Générale des Impôts ; les organes de gestion et d’information au niveau des services centraux ; les organes d’exécution à l’intérieur des services extérieurs ou déconcentrés[13].

Les fonctions comportent les fonctions proprement fiscales comme les missions fiscales pour le compte de l’Etat, des collectivités territoriales ou des organismes de rattachement (EEP)[14] ; les fonctions non directement fiscales, ainsi les activités foncières et domaniales assurées par les services du cadastre, du domaine ou de la conservation foncière. On notera également les tâches à caractère juridico-économique comme le contrôle, la réglementation, l’attribution des subventions, la délivrance des agréments ; les missions de coopération internationale, ainsi la coopération en matière de formation et d’assistance technique, la coopération en matière de formation et de contrôle fiscal[15].

Les moyens technologiques comprennent notamment l’ensemble des technologies, (données informatiques, logiciels, programmation, système de décision et de gestion, réseaux sociaux, streaming…) permettant ainsi le traitement, dans des temps records, de l’information et de sa communication aussi rapidement qu’elles étaient venues[16].

Ainsi l’administration fiscale serait-elle en mesure d’établir des rapports avec ses usagers-contribuables, particulièrement ceux qui sont assujettis au système déclaratif, sur des bases d’équilibre et non pas sur des rapports conflictuels.

Le cadastre est l’ensemble des services et documents ayant pour objet le recensement de toutes les propriétés foncières, de la recherche de leurs propriétaires apparents ou réels, de la reconnaissance et de la définition des limites cadastrales de ces propriétés, de leur description et de leur évaluation.

L’étude du cadastre requiert la considération de la documentation, des travaux topographiques, des évaluations foncières et de la conservation cadastrale.

La documentation cadastrale se compose du plan cadastral, ainsi la représentation graphique du découpage du territoire communal dans tous ses détails, et de la documentation littérale qui est en général une documentation des services du cadastre sous forme de base de données propres au ressort territorial du service[17].

Les travaux topographiques comprennent la confection et la conservation des plans cadastraux, la vérification et la coordination des levers à grande échelle par les services publics[18].

Les évaluations foncières déterminent le revenu foncier d’un bien (propriété bâtie et non bâtie)[19], appelée valeur locative. La valeur d’un bien représente le loyer ou le revenu net que le propriétaire tire ou pourrait tirer d’un immeuble à des conditions normales.

Cette valeur locative sert de base commune au calcul des impôts fonciers ou partiellement fonciers comme la taxe d’habitation, ancienne taxe urbaine, la taxe sur les profits immobiliers, la taxe professionnelle, ancienne patente, les bénéfices agricoles forfaitaires ou les cotisations sociales agricoles, notamment pour la catégorie d’agriculteurs qui est concernée par ce type d’obligation fiscale.

La conservation cadastrale est chargée de tenir à jour la documentation de toutes les modifications provenant de causes juridiques (ventes, locations, fermages, donations, partages) ou matérielles (constructions nouvelles, démolitions, changements de la nature de la propriété ou de la nature des cultures) constatées dans la situation des biens et des propriétaires[20].

En somme, le cadastre accomplit au moins quatre missions principales : une mission proprement fiscale consistant dans l’évaluation foncière des propriétés bâties et non bâties, une mission foncière comprenant l’identification physique des biens et l’identification juridique des personnes et de leurs droits, une mission technique comportant la confection et la maintenance du plan cadastral, la coordination, la vérification et la centralisation des levers, et enfin une mission économique consistant dans le remembrement rural et le fichier cadastral forestier[21].

B – L’impôt et les forces politiques

L’élaboration et la mise en œuvre de la loi fiscale sont manifestement le résultat de la confrontation de la volonté du groupe dirigeant et celle des groupes de pression dominants et d’autres « partenaires de la négociation ». Les pouvoirs publics sont en principe ceux qui choisissent les fins et les moyens de l’Etat, choix qui ne correspondent pas nécessairement ni aux attentes de la nation, ni à l’action des groupes d’intérêt (lobbies et groupes de pression)[22]qui essaient d’obtenir de la catégorie dirigeante, par voie de tractations, des dérogations, atténuations ou exemptions, des mesures favorables à leurs intérêts[23]. Intérêts qui ne sont pas, par ailleurs, forcément ceux de la grande majorité[24].

Aussi, la répartition de la charge fiscale, comme l’écrivait très justement J. Meynaud, « tend largement à refléter les pressions et les forces respectives de marchandages des divers groupes au pouvoir », au sens large du mot : « pouvoir politique, économique et social[25] ».

C – L’impôt et les structures sociales

Si la nature et le type de fiscalité mise en place par l’Etat reflète la prépondérance de la catégorie sociale dominante, elle contribue aussi à l’accentuation de ses caractères essentiels[26] : type d’imposition et de financement, allocation financière et fiscale, attitude de l’administration, nature des contrôles…

En effet, si ces caractères s’accordent avec la volonté et le comportement socio-économique des autres catégories sociales, le système fiscal mis en place peut être durablement accepté, puisque adapté à la structure sociale à laquelle il s’applique, donc consenti par les contribuables[27].

Dans le cas contraire, c’est-à-dire en cas de désaccord entre le comportement du groupe dirigeant et les attentes des catégories socioprofessionnelles et de contribuables, le système fiscal serait perpétuellement rejeté, puisque inadapté, donc récusé par les contribuables et les redevables. En ce sens que toute « institution juridique ne vaut que par l’adhésion sociologique qu’elle rencontre[28] ».

L’inadaptation de la fiscalité à l’environnement auquel elle doit s’appliquer conduit inexorablement à la déformation des structures sociables, et à la déception et désillusion des catégories sociales à revenus très faibles, faibles et moyens, donc à la déstabilisation du régime sociopolitique, et partant, au renforcement de la coercition administrative et politique, attitude qui n’arrange nullement la situation : elle ne fait que l’aggraver[29].

  • 2 – La psychologie de l’impôt

Les rapports entre les contribuables et l’administration fiscale sont souvent d’une nature conflictuelle, particulièrement pour ceux qui sont assujettis au système déclaratif. Les redevables dont la contrainte fiscale est prélevée à la source (fonctionnaires, contractuels et salariés) sont anesthésiés et la saignée quoique douloureuse réellement, en rongeant leur pouvoir d’achat, demeure tout de même indolore quant à sa ponction. Aussi, globalement, la recherche d’un équilibre destiné à concilier l’efficacité de l’action administrative et les droits et garanties des contribuables, de manière générale, demeure-t-elle primordiale[30].

A- Les tensions psychologiques entre le contribuable et l’administration fiscale

L’étude des oppositions psychologiques entre le contribuable et le fisc nécessite la considération de la psychologie du contribuable et de la psychologie de l’agent du fisc.

La psychologie du contribuable dépend de son milieu socioprofessionnel, de son état d’esprit, du poids et des conditions d’assujettissement à l’impôt[31], ainsi que du volume et du degré de liquidité de ses finances. Ibn Khaldoun observait déjà, dès 1377, dans ses « Prolégomènes », que l’injustice et le poids de l’impôt pèsent lourdement sur la psychologie des contribuables[32].

La psychologie du contribuable dépend non seulement du poids et du nombre d’impôts qui viennent régulièrement, assez souvent, amputer d’une partie conséquente le même revenu ou bénéfice, mais aussi de l’importance de ce sentiment de lésion et de frustration que le redevable, assujetti aux déclarations et/ou télédéclarations de ses revenus ou bénéfices, éprouve dans ses rapports à l’égard de l’agent du fisc (percepteur, agent de l’administration chargé de recouvrement, contrôleur, enquêteur…)[33].

La psychologie des fonctionnaires du fisc est fonction, elle aussi, du type d’administration qui les a formés, de leur niveau de formation, d’instruction et d’expérience, de leur milieu social, ainsi que de leur aptitude à mesurer l’écart qui peut exister entre les normes politico-économiques et la réalité sociale, en évitant de tomber dans l’un ou l’autre extrême : dans le juridisme et l’imperium de l’Administration, ou dans le népotisme, le favoritisme et le clientélisme[34]. De telles attitudes de part et d’autre (lésion et incompréhension) sont des causes de tensions psychologiques majeures entre le contribuable et l’administration fiscale.

B – La recherche d’un équilibre psychologique entre le contribuable et l’administration fiscale

Cet équilibre peut être atteint par la recherche d’une meilleure communication entre les deux partenaires et une plus grande protection des droits et garanties des contribuables.

La recherche d’une meilleure communication passe nécessairement par l’amélioration des relations humaines entre administration et administrés : sur le plan de l’accueil, de l’assistance, de la simplicité des documents, de la transparence fiscale, de la publicité de l’impôt[35], de la participation des contribuables au fonctionnement de l’administration, étant considérés non seulement comme pourvoyeurs de fonds à cet appareil coercitif, mais aussi comme des usagers de l’administration fiscale[36].

La protection des droits et garanties des contribuables consiste notamment dans la protection juridique des droits et libertés individuels et collectifs en matière fiscale, l’information des contribuables de leurs droits et devoirs, l’instauration d’un dialogue entre administration et administrés, la décrispation des rapports et la nécessaire conciliation des prérogatives de l’administration et des garanties des contribuables, ainsi que l’aménagement de procédures de plus en plus complexes[37].

Ces droits, garanties et devoirs fiscaux qui doivent être consignés dans la constitution peuvent constituer des principes de référence s’imposant au législateur comme à l’ensemble des pouvoirs publics et aux juridictions, et formant de ce fait un véritable droit fiscal constitutionnel : principes, lois et règlements fiscaux[38].

Les complexités procédurales et la carence de contrôle ferme, inflexible, ainsi que le manque de rigueur dans la gestion publique financière et fiscale sont à l’origine de nombreuses entraves matériels et psychologiques (blocage, lourdeur administrative, corruption, désaffection à l’égard des instituions) qui, assurément, mettent à mal, non seulement les intérêts propres des contribuables mais aussi ceux du pays tout entier : problèmes de la qualité de gestion et d’investissement, des entrepreneurs et bailleurs de fonds, d’efficience et de croissance, de développement et d’environnement.

Aussi, est-il force de constater que la corrélation entre ces faits et phénomènes est incontestable : psychologie et physiologie, structure et conjoncture, substance et procédure, homme et institution.

  • 3 – La psychosociologie de l’impôt

L’étude de la psychosociologie fiscale ou de la psychologie sociale de l’impôt, qui traduit l’influence du fait ou du phénomène fiscal[39] sur le comportement du contribuable-redevable, requiert, en l’espèce, la considération du fondement, de l’axiologie et de la mythologie de l’impôt[40].

A- Le fondement de l’impôt

Plusieurs conceptions prétendaient expliquer le fondement du prélèvement fiscal, c’est-à-dire les origines du consentement à l’impôt ou l’acceptation du principe même de la levée d’impôt, ce qui est différent du consentement de l’impôt, c’est-à-dire l’acceptation tacite du prélèvement obligatoire par les contribuables, voire par leurs représentants[41].

La conception économique de l’impôt insiste sur le fait que le paiement d’un tribut, d’un prélèvement obligatoire et régulier, différent du pillage, serait apparu en effet lorsque la communauté primitive serait parvenue à dégager un surplus économique. Un tel paiement de tribut va progressivement permettre la constitution d’une armée et d’une administration par la possession du monopole de la violence[42], et plus précisément du monopole de la violence physique légitime[43], ou encore du monopole de la violence symbolique, qui est une soumission pérenne et insidieuse, permettant aux gouvernants- en inculquant aux générations des habitus (la culture ou l’idéologie étatique) – de faire l’économie de la violence physique et brutale[44].

La conception anthropologique de l’impôt souligne le fait que l’impôt serait le prolongement du rituel sacrificiel que les hommes faisaient, par obligation cultuelle, sous forme d’offrandes, de sacrifices, de dons et de contre-dons aux dieux et aux représentants des dieux[45].

La conception antique, politico-empirique de l’impôt, instituée par voie d’autorité, dans un premier temps (Mésopotamie, Egypte, Grèce, Rome, Etat islamique, Europe médiévale), puis libérale, compensatoire dans un deuxième temps (XVIIIe – XIXe s.), pose l’impôt comme le prix que les contribuables paient en contrepartie de la sécurité et des services apportés par l’Etat (impôt-échange)[46]; et enfin socioéconomique, dans un troisième temps (fin du XIXe s.- jusqu’à aujourd’hui), considère l’impôt comme un instrument de solidarité, de couverture de charges publiques, de redistribution et d’égalisation, et tient compte de la capacité contributive des contribuables et de la progressivité de l’impôt[47].

Cependant, chacune de ces conceptions reflétait plus ou moins l’idéologie dominante de son époque et n’expliquait qu’imparfaitement la nature profonde de l’impôt, qui est un fait social, un fait institutionnel apparaissant comme une obligation sociale liée à l’existence d’une sociabilité, d’un système social, dont le patrimoine des personnes, face à la pénurie des ressources naturelles ou autres, ou à la mauvaise gestion, forme l’une de ses composantes majeures[48].

L’institution fiscale ne requiert pas plus de justifications que les autres institutions sociales (Etat, pouvoir, ménage…), voire la société elle-même. Quoique, il existe aujourd’hui, des États qui ne sont pas forcément fiscaux, à l’exemple des États pétroliers et gaziers, voire des paradis fiscaux[49]. Lorsque ces États, pétroliers et gaziers, notamment, ou ceux ayant d’autres ressources naturelles abondantes, ou en tout cas largement suffisantes (agriculture, forêts, phosphate, énergie, diamant, or, argent, fer…) recourent massivement à l’impôt, c’est principalement parce qu’ils engendrent eux-mêmes des externalités négatives graves, comme la mauvaise gestion, qui empêchent l’économie d’atteindre un seuil de croissance optimale. Aussi,  l’internalisation de ces effets externes négatifs incombe-t-elle à l’État lui-même, au premier chef, et à personne d’autre[50].

B – L’axiologie de l’impôt

Sur le plan fiscal, l’axiologie qui est la théorie des valeurs morales ou le système de valeurs, se traduit par les notions de justice fiscale et de devoir fiscal.

La justice fiscale qui est un des aspects de la justice sociale consiste dans la conformité des principes et des conditions d’application du système fiscal aux normes éthico-politiques applicables dans une société donnée[51]. L’étude de la justice fiscale peut être cernée à partir de la relativité, de la capacité de paiement et de l’égalité.

Du point de vue de la relativité, la justice fiscale varie selon le temps ou l’histoire, l’espace ou la géographie et les conceptions idéologiques et politiques des hommes et leur culture : gréco-latine, arabo-musulmane, occidentale, asiatique, orientale, subsaharienne…

Du point de vue de la capacité de paiement, la justice fiscale est un principe abstrait ayant pour fondement philosophique un idéal d’équité, de justice naturelle, mais aussi une réalité qui se traduit au niveau de la collectivité par la capacité de paiement des contribuables, c’est-à-dire par l’adaptation de l’impôt aux facultés contributives de celui qui doit le payer.

Du point de vue de l’égalité, entendue au sens juridique du mot et non pas d’égalitarisme (doctrine visant à l’égalité absolue en matière politique et sociale), mais d’égalité de traitement pour des situations objectivement définies. La justice fiscale requiert l’universalité de l’impôt, c’est-à-dire l’application de l’impôt de la même manière à la totalité des contribuables qui se trouvent dans les mêmes conditions socioéconomiques.

On notera ainsi des dérogations et des adaptations légitimes – comme la proportionnalité de l’impôt aux capacités contributives, la progressivité à l’égard du revenu, la considération des matières ou produits de première nécessité et des situations de famille, la non-discrimination dans le comportement des autorités fiscales – et qui concernent également de la même façon l’ensemble des redevables qui sont dans les mêmes situations familiales, sociales, économiques ou socioprofessionnelles.

L’égalité implique un rapport d’équilibre entre les contribuables pauvres, ou à revenu faible, et les contribuables riches, ou à revenu élevé, entre les contribuables honnêtes et ceux qui le sont moins. Mais dans la pratique le primat souvent du rendement sur la justice traduit une réalité amère : la justice fiscale n’est souvent qu’une pure illusion[52].

Le devoir fiscal ne repose plus actuellement sur un fondement éthico-politique. Cette part affective du devoir fiscal suscite aujourd’hui l’ironie, voire la méfiance à l’égard du fisc ; puisque la notion de devoir fiscal est intimement liée à celle de la justice fiscale, et aux coûts en bien-être : si la justice est rompue, le devoir fiscal étant à l’avenant, le sera inexorablement.

Il est quasiment impossible d’exiger un sens civique d’un contribuable, surtout lorsque celui-ci sait pertinemment que son voisin, ou une progéniture, voire toute une catégorie sociale, se soustrait à l’impôt sans scrupule, que ce soit par évitement, fraude, évasion fiscale ou fuite des capitaux.

Le fondement sociologique cristallisé par le principe de solidarité est plutôt rassurant, voire crédible. Toutefois, le devoir fiscal ne peut jouir d’une telle crédibilité, d’une spontanéité ou d’une sincérité dans son exécution sans qu’il puisse effectivement reposer sur un minimum nécessaire de civisme fiscal, lequel est intimement lié au degré de satisfaction des attentes des citoyens-contribuables, à leur qualité de vie, à leur bien-être.

Le civisme fiscal peut être cultivé. Sa culture requiert deux paramètres : une orientation politique saine, tant générale que fiscale, susceptible de recueillir une forte adhésion des catégories de contribuables, et des sanctions fermement définies et effectivement appliquées à l’égard des contrevenants, quels qu’ils soient : faibles ou puissants, dans les affaires ou dans la politique.

C – La mythologie de l’impôt

La mythologie de l’impôt est l’ensemble des mythes et des légendes que les contribuables possèdent en matière fiscale. Les mythes sont des constructions de l’esprit qui ne reposent pas sur un fond de réalité.

Les légendes sont des représentations de faits réels, fiscaux en l’occurrence, accréditées dans l’opinion, mais déformées ou amplifiées par l’imagination. La mythologie fiscale repose sur deux thèmes majeurs : la réforme fiscale et l’inquisition fiscale.

Le caractère mythologique de la réforme fiscale tient à deux facteurs principaux : un sentiment de mécontentement à l’égard du système fiscal et une vision eschatologique de la réforme fiscale.

Le sentiment de mécontentement éprouvé en général par les contribuables à l’égard du système fiscal consiste notamment dans les reproches fondés faits à celui-ci : poids écrasant, iniquité, corruption, fraude fiscale, fuite des capitaux, complexité inutile et coûteuse, inefficacité…mais aussi dans les décisions prises en réactions contre ces failles et anomalies : refus de l’impôt, fraude, évasion, révoltes…

La vision eschatologique de la réforme fiscale, au sens d’un soulagement final d’une peine, procède de ce sentiment de mécontentement à l’égard de l’impôt, et consiste dans une conception messianique de la réforme représentée par l’image d’un ordre fiscal instauré dans la justice et le bonheur, où règne un impôt unique paré de toutes les vertus : simplicité, justice, efficacité, transparence, rendement et équité.

Cet ordre est irréalisable pour trois raisons : l’impôt unique est un mythe[53], une utopie[54], la réalisation simultanée de ces cinq éléments (simplicité, justice, efficacité, transparence, rendement) est quasiment impossible, la réforme met de grands intérêts en jeu et le législateur finit par céder sous le poids des groupes d’intérêts et des partenaires influents associés à la négociation de la loi fiscale.

Le caractère mythologique de l’inquisition, qui concerne plutôt les pays dits développés[55], consiste dans les griefs que les contribuables formulent à l’encontre des mesures de vérification du fisc, présentées comme des opérations de caractère vexatoire où le redevable est victime de l’arbitraire de l’administration fiscale, alors que ces griefs n’ont très souvent aucun fondement réel. Ce qui est fondé dans les contestations et protestations des contribuables c’est plutôt le poids des impôts : trop d’impôt, tue l’impôt ! Jilali Chabih – PES – UCAM – Maroc.

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  1. Chabih, Les aspects financiers de la décentralisation territoriale au Maroc, Université Cadi Ayyad, collection de la FSJES, Marrakech, 1997 ; Les finances des collectivités locales au Maroc, L’Harmattan, 2005 ; Objet, fonctions et démocratie de l’impôt, article disponible sur le Web ; Recherches sur l’origine de la collectivité, de l’autorité et de la règle de droit et leur adaptation aux différentes transformations socioéconomiques et politiques dans l’histoire de l’humanité, publications de la FSJES – UCAM, séries colloques et séminaires, n° 54-2017 ; Les sources de financement public, 2020, article accessible sur le Web

Marc Leroy, Découvrir la sociologie fiscale dans la Revue, Regards croisés sur l’Économie, 2007, n°1

[1] Université de Montréal, Faculté des arts et des sciences, Département de sociologie, article disponible sur le Web.

[2] La science financière englobe l’approche, la recherche des sources de financement (taxation, tarification, gestion, donation), et l’affectation rationnelle des ressources à l’économie (investissement dans les services publics, dans les ressources humaines (redistribution et bien-être social) et dans les rapports à l’humain, à la faune et à la flore (diagnostic, prévision, exécution, régulation, et évaluation). V. dans le même sens R. Musgrave, The theory of public finance: A study in public economy, Hardcover 628 pages Publisher: McGraw-Hill 1959.

[3] Faits antérieurs à la sociologie, en tant que science, de plusieurs milliers d’années, v. Jilali Chabih, Recherches sur l’origine de la collectivité, de l’autorité et de la règle de droit et leur adaptation aux différentes transformations socioéconomiques et politiques dans l’histoire de l’humanité, publications de la FSJES – UCAM, séries colloques et séminaires, n° 54-2017.

[4] On aura ainsi les faits fiscaux suivants : justice, équité, éthique, dépense, révolte, consentement, légitimité, idéologie, territorialité, démocratie, contrainte, gaspillage, fuite des capitaux, etc.

[5] V. Vocabulaire philosophique de Lalande (1902-1923) ; Dictionnaire Petit Robert.

[6] Le sentiment de frustration et d’injustice est extrêmement fort dans tout pays où la principale source de financement est l’impôt, et par conséquent la pression fiscale y est infiniment lourde, et où les services publics, même les plus basiques, sont quasiment inexistants.

[7] J. Chabih, Les aspects financiers de la décentralisation territoriale au Maroc, Université Cadi Ayyad, collection de la FSJES, Marrakech, 1997, p. 52 et s. et 193 et s. ; du même auteur, Les finances des collectivités locales au Maroc, L’Harmattan, 2005, p. 7 et s. 39 et s. 141 et s. 173 et s. ; Objet, fonctions et démocratie de l’impôt, article disponible sur le Web ; Marc Leroy, Découvrir la sociologie fiscale dans la Revue, Regards croisés sur l’Économie, 2007,  n°1 p. 94-100.

[8] Cette corrélation entre impôt, Etat et société avait déjà été systématisée par Ibn Khaldun, il y a 646 ans dans ses « Prolégomènes », p. 308-316 ; Gabriel Ardant, Théorie sociologique de l’impôt, thèse pour le doctorat ès lettres, Imprimerie Nationale MCMLXV, Université de Paris, Faculté des Lettres et Sciences Humaines, 1965, 2 vol. 817 pages.

[9] La constitution de 2011, dispose dans ses articles : que l’exercice des droits garantis par la constitution « se fait en corrélation avec l’accomplissement des devoirs (art. 37) ; que tous « contribuent à la défense de la Patrie et de son intégrité territoriale contre toute agression ou menace », (art. 38) ; que « Tous supportent, en proportion de leurs facultés contributives, les charges publiques…», (art. 39) ; que « Tous supportent solidairement et proportionnellement à leurs moyens, les charges que requiert le développement du pays, et celles résultant des calamités et des catastrophes naturelles » (art. 40).

[10] Lucien Mehl et Pierre Beltrame, Science et technique fiscales, PUF, 1984, p. 587-709.

[11] Dans l’histoire de l’État musulman, depuis les années 628-629 et les suivantes, l’administration fiscale et ses agents, Bit al mal, Diwan al aamal wa ljibayat, annader, al jabi, al amel, al kharess, al acher…ont joué un rôle très important dans la collecte des impôts : zakat, kharaj, zézaya, dîme agricole, dîme commerciale…Al Mawardi, les statuts gouvernementaux, p.98 et 175 et s. Ibn Taymiyya, La politique légale, p. 32 et s., Ibn Khaldun, Prolégomènes, op. cit., p. 268-271, Mahmoud Kafrawi, Contrôle des finances en Islam, Alexandrie, 1983, p. 52 et s.

[12]Histoire de l’impôt, Paris, Fayard, 1971- 1972, 2 t. p. 849

[13] Se pose, en l’occurrence, la grande question de savoir quelles sont les catégories fiscales qui relèvent du domaine de la loi et quelles sont celles qui relèvent du règlement ? L’art. 71 de la constitution précise que : « sont du domaine de la loi… le régime fiscal et l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impôts ; … le régime des douanes », mais qu’en est-il des nombreux prélèvements obligatoires sous la forme de moukous, de taxes, de taxes parafiscales, de cotisations, de solidarité, de rémunération de services rendus, de péage, etc. qui relèvent du domaine règlementaire ? Cf. avec grand intérêt : J.-L. Guièze, Le partage des compétences entre la loi et le règlement en matière financière, LGDJ, Paris, 1974, p. 31-75.

[14] Entreprises et établissements publics, territoriaux, nationaux et internationaux.

[15]L. Mehl et P. Beltrame, Science et technique fiscales, op. cit., p. 587-647.

[16] Les nouvelles technologies de l’information et de la communication, NTIC ou TIC, en anglais ICT, ce sont des technologies qui permettent de traiter et de transmettre toutes les informations numériques.

[17]Ces documents peuvent être consultés, délivrés et diffusés.

[18] Rapport existant entre une longueur et sa représentation sur la carte, ainsi 1mm représente 100 m à l’échelle de 1/100 000.

[19] Propriétés foncières et domaines privés immatriculés ou en cours d’immatriculation, des terres habous, des terres guich, des terres appartenant aux communautés régionales, etc.

[20] Cf. la loi 58.00 portant création de l’Agence Nationale de la Conservation Foncière, du Cadastre et de la Cartographie, du 13 juin 2002, Bulletin officiel n° 5036 en date du 5 sept. 2002, p. 904.

[21]Cf. Les services en ligne de la Conservation Foncière et du Cadastre : certificat de propriété, plan cadastral, calcul de contenance, cartographie, authenticité des documents livrés, publicité foncière, mohafadati, chikaya, référentiel commun des prix, demande de duplicata du titre foncier, demande de copie des documents, demande de bornage et reprise de bornage, demande de consultation, demande de certificat.

[22]Lobby au singulier et lobbies au pluriel : groupes de pression américains. Le mot est anglais à l’origine et désigne les tractations qui se font par téléphone et / ou dans les « couloirs » et dans les coulisses des pouvoirs public. V. avec intérêt L. Mehl et P. Beltrame, Science et technique fiscales, op. cit. p. 744 et s.

[23] Les dépenses fiscales représentent durant les années 2000-2021 quelque 30 milliards de Dh ; les exonérations permanentes et réductions d’impôts occupent environ 92% desdites dépenses fiscales, rapport sur les dépenses fiscales, annexe de la loi de finances, exercice de 2022.

[24] Dès 1377 Ibn Khaldun, dans Prolégomènes, op. cit. p. 308-312, avait élaboré une théorie sur la corrélation entre les comportements sociopolitiques des gouvernants et le poids et la nature des prélèvements fiscaux ; v. dans le même sens Pheuiphanh Ngaosyvathn, Le rôle de l’impôt dans les pays en voie de développement, Paris, LGDG, 1974, p. 111, Fiscalité et structure socio-politique, et notamment p. 185, l’environnement sociopolitique de l’impôt.

[25] Jean Meynaud ou l’utopie revisitée : Actes du colloque de Sciences Politiques, tenu à l’Université de Lausanne ; Coll. « Études et documents pour servir à l’histoire de l’Université de Lausanne » n° XXIII, 1986, 402 p. La législation fiscale est le résultat d’une négociation acharnée entre tous les partenaires de ladite négociation, c’est-à-dire tous ceux qui disposent d’une part de la souveraineté fiscale, à savoir pouvoirs publics, parlementaires, commissions, organismes professionnels (patronat et syndicats des salariés), cf. J.-C. Martinez, Le statut de contribuable, op. cit. p. 152 et s.

[26] G. Ardant, Histoire de l’impôt, op. cit. t.2, p. 356 ; L. Mehl et P. Beltrame, Science et technique fiscales, op. cit. p. 748 et s.

[27] Encore faut-il savoir si ce consentement est de forme diffuse, parlementaire, socioprofessionnelle ou référendaire, J.-C. Martinez, Le statut de contribuable, LGDJ, 1980, p. 324-332. Autrement dit, s’agit-il d’un consentement réel, démocratique, ou d’un simple camouflage, voire d’un camouflet !

[28]J.- C. Martinez, op.cit. p. 329.

[29]Sur ces deux points : l’interaction de la fiscalité et des forces politiques, de la fiscalité et des forces sociales voir avec intérêt Ibn Khaldun, op.cit. p. 308-316 ; G. Ardant, Histoire de l’impôt, Fayard, 1972.

[30] Les dépenses trop excessives des gouvernants, lesquelles proviennent par ailleurs des impôts, et la transformation desdits gouvernants en de véritables commerçants, agriculteurs et spéculateurs, affectent sérieusement l’économie, la fiscalité et la psychologie des contribuables, Ibn Khaldun, Prolégomènes, p. 310-312 ; Pheuiphanh Ngaosyvathn, op. cit., p. 126-128 ; H. Laufenburger, Théorie économique et psychologique des finances publiques, Paris, Sirey, 1956 ; G. Schmölders, Psychologie des finances et de l’impôt, PUF, 1973 ; J. Schumpeter, La crise de l’Etat fiscal, in Impérialisme et classes sociales, Flammarion, 1984, p. 229-282.

[31]Toutes ces caractéristiques reflètent aussi parallèlement le niveau de développement du pays en question ; Pheuiphanh Ngaosyvathn, op. cit., p. 129-133.

[32] Ibn Khaldun, op. cit. p. 308-312 ; L. Mehl et P. Beltrame, op. cit. p. 758 et s.

[33] Pheuiphanh Ngaosyvathn, op. ct., Les agents de l’administration fiscale, p. 146-184 ; L. Mehl et P. Beltrame, Science et technique fiscales, op. cit. p. 753 et s.

[34]Selon une déclaration relayée dans des communiqués de presse du Secrétaire général des Nations Unis SG/SM/6318 du 10 septembre 1997 : « La corruption est un fléau qui sape les fondements de toute société civilisée. Elle porte atteinte à la morale, à la démocratie, à la bonne conduite des affaires publiques et à l’État de droit, et absorbe des ressources nécessaires au développement ».

[35]Des listes nominatives des personnes assujetties à l’IR et à l’IS.

[36]Dans la mesure où un certain nombre de pratiques organisent la participation de ces contribuables au fonctionnement de ladite administration : participation individuelle ou collective à l’établissement, à la gestion et à l’élaboration de l’impôt, par le biais de commissions paritaires, de commissions compétentes, de commission de concertation. Cf. P. Lavigne, Le contribuable comme usager de l’administration fiscale, in Rev. Française de finances publiques, n° 15, 1986.

[37] V. avec intérêt L. Mehl et P. Beltrame, Science et technique fiscales, op.cit. p. 753-768.

[38]Les principes fondamentaux du droit fiscal constitutionnels sont : légalité, égalité, annualité, sanctions fiscales. Le principe de la légalité fiscale qui est la traduction du consentement à l’impôt implique que le pouvoir de lever l’impôt (décision d’imposer, création d’impôt, détermination de l’assiette, du taux et du recouvrement) relève de la loi, donc de la compétence du législateur. Le principe d’égalité comporte deux volets : le principe d’égalité devant la loi fiscale avec dérogations : différence de traitement se justifiant par une différence de situations et pour des raisons d’intérêt général poursuivi par le législateur ; le principe d’égalité devant les charges publiques exprime la référence aux capacités contributives des citoyens en matière de prélèvement fiscal, de tarification des services publics, d’indemnisations accordées par la collectivité, de solidarité nationale… Cependant, toute rupture caractérisée de l’égalité est contraire à la loi. Le principe de l’annualité de l’impôt qui signifie que l’autorisation de prélever l’impôt n’est donnée que pour un an et expire donc à la fin de chaque année, avec dérogations : modifications en cours d’exercice, dispositions rétroactives, inclut également le principe de la nécessité de l’impôt, nécessité liée à l’organisation de la vie en société et au fonctionnement de l’Etat. Le principe de la nécessité de l’impôt peut être invoqué tout aussi bien par l’Etat (assurer le financement des dépenses et de l’économie en général, enrayer la fraude fiscale, procéder à des contrôles, perquisitions et saisies) que par les contribuables (respect de la liberté individuelle, du droit de propriété, et l’inviolabilité du domicile). Le principe de l’assimilation des sanctions fiscales aux sanctions pénales impose au législateur le respect de trois autres principes : le principe de proportionnalité des sanctions fiscales infligées par l’administration aux contrevenants ; les limites à la rétroactivité et à la pratique rétroactive des sanctions fiscales (amendes, pénalités de mauvaise foi, majorations, intérêts de retard, décisions de justice passées en force de chose jugée) ; le respect des droits de la défense signifie qu’aucune sanction fiscale ne peut être infligée sans que l’intéressé ne soit mis à même de présenter contradictoirement ses observations sur les faits qui lui sont reprochés et sans avoir eu accès au dossier le concernant. V. L. Philip, Le droit constitutionnel des finances publiques, R.F.F.P., n° 15, 1986 ; Droit fiscal constitutionnel, Economica, 1990 ; Les fondements constitutionnels des Finances publiques, Economica, 1995.

[39] Il est évident que le phénomène fiscal englobe aussi les institutions fiscales qui le mettent en place.

[40] V. avec intérêt L. Mehl, P. Beltrame, Science et technique fiscales, op. cit. p. 715-743.

[41]Le principe du consentement de l’impôt qui fut à l’origine (XIIIe- XIVe et XVe s.) un facteur déterminant dans l’évolution des institutions politiques : des organisations politiques et sociales représentant les contribuables pour établir l’impôt (Etats généraux en France, Parlement en Grande-Bretagne, Corps de marchands au Maroc…) a donné naissance dès la fin du XVIIIe s. (Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789) à un autre grand principe : le principe de légalité fiscale. Cf. L. Trotabas, J. M. Cotteret, Droit fiscal, Dalloz, 1970 ; G. Ardant, Histoire de l’impôt, Paris, Fayard, en 2 t. 1971 et 1972 ; M. Duverger, Finances publiques, PUF, 1978. Sur les limites de ce principe notamment par l’extension du pouvoir réglementaire cf. J.-L. Guièze, Le partage des compétences entre la loi et le règlement en matière financière, LGDJ, 1974.

[42]G. Ardant, Histoire de l’impôt, Fayard, déjà cité.

[43] Max Weber, Le savant et le politique, traduction et publication J. Freund, 1959, préface R. Aron.

[44] V. Les écrits de Pierre Bourdieu, Ce que parler veut dire, Fayard, 248 p. et aussi La mort saisit le vif, Actes de la recherche en sciences sociales, n° 32-33, 1980 ; cf. dans le même ordre d’idées E. Durkheim, L’éducation morale, Paris, F. Alcan, 1925 ; M. Foucault, Surveiller et punir, Paris, Gallimard, 1978.

[45]P. Clastres, la société contre l’Etat, Ed. de Minuit, 1974 ; M. Sahlins, Âge de pierre, âge d’abondance, Gallimard, 1978 ; M. Bouvier, M.-C. Esclassan, J.-P. Lassale, Finances publiques, L.G.D.J., 4e édition.

[46]Cf. à ce propos J. Bodin, T. Hobbes, Léviathan ; trad. F. Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 368 ; Vauban et son projet d’une dîme royale publié en 1707 ; J. Locke, J.-J. Rousseau, Montesquieu, Mirabeau et sa théorie de l’impôt (1760) ; P.-J. Proudhon et sa conception de l’impôt, Paris, 1868.

[47]Cf. à cet égard les écrits de P. Leroy-Beaulieu, Traité de science des finances, Ed. Guillaumin et Cie, 1899, 2 vol. 6ème édition ; P.-M. Gaudemet, Finances publiques, Impôt-Emprunt, Ed. Montchrestien, Paris, 198, p. 111-123 ; G. Jèze, Cours de finances publiques, Giard, 1931 ; E. Allix, Traité élémentaire de science des finances et de législation financière, Ed. Rousseau, 1931.

[48] J. Chabih, Les sources de financement public, 2020, article accessible sur le Web.

[49]J. Chabih, les sources de financement public, op. cit.

[50] Jacques Percebois, Economie des finances publiques, Ed. A. Colin, 1991, p. 99-105 ; Xavier Greffe, Économie des politiques publiques, le financement des politiques publiques, Dalloz, 1997, p. 236-276.

[51]L’importance et la nécessité de l’éthique et d’un « code de conduite » dans les administrations et les entreprises est de plus en plus à l’ordre du jour en l’état actuel d’une conduite douteuse d’un certain nombre de responsables des entreprises et des administrations : cf. Université d’été du patronat qui a eu lieu le 29 août 2003 dans l’Ecole des Hautes Études Commerciales (HEC) à Jouy en-Josas sur l’éthique de l’entreprise.

[52] L’illusion fiscale est une stratégie de politiques publiques financières poursuivie par les pouvoirs publics consistant à escamoter l’écart entre le coût réel et l’effet de l’action publique fiscale sur le contribuable. Une telle attitude est bénéfique pour les gouvernants mais très dommageable pour le citoyen-redevable. Cf. L’Economiste, l’illusion fiscale, du 4 sept. 2017, disponible sur le Web ; Xavier Greffe, Économie  des politiques publiques, op. cit. p. 265 ; F. Bastiat, théoricien économique français, 19ème s., écrivait dans « l’État », Journal des Débats, 25 sept. 1848, p.1, col. 5, accessible sur le web, « l’État donne l’illusion qu’il redonne au contribuable davantage qu’il ne lui prend ».

[53]J. Grosclaude, R. Hertzog, Le mythe de l’impôt unique, RFFP, n° 29, 1990 ; P. Beltrame, L. Mehl, Techniques, politiques et institutions fiscales comparées, PUF, 1997.

[54]Plusieurs conceptions et projets en matière d’impôt unique ont été élaborés, mais ils se sont sitôt avérés irréalisables, utopiques, dans la mesure où ils dérivaient d’une vision idéale plus que de l’analyse des réalités socio-économiques. On relèvera ainsi l’impôt unique sur le foncier des physiocrates au XVIIIe s. (Quesnay, Baudeau, Mirabeau, Condorcet, Gournay, Turgot), puis du socialiste américain Henry George (1839-1897) dans un ouvrage intitulé « Progrès et pauvreté » paru en 1879 ; l’impôt unique sur le capital fixe (sol et biens immobiliers) écartant le capital circulant, proposé dès le XIXe s. par Menier (L’impôt et le capital, Plon et Guillaumin, 1874), mais également par Emile de Girardin, puis aujourd’hui par le prix Nobel d’économie Maurice Allais (l’impôt sur le capital et la réforme monétaire, Hermann, 1976 et Pour la réforme de la fiscalité, Juglar, 1990) ; puis enfin, l’impôt unique sur la dépense prôné historiquement déjà par Thomas Hobbes dans son Léviathan en 1651, et actuellement par Nicolas Kaldor dans An expenditure tax, Allen and Unwin University Books en 1955 ; par le prix Nobel d’économie James Meade in The structure and reform of direct taxation, Ed. IFS, 1978 ; par Fernand Oulès et André Margairaz in La fraude fiscale et ses succédanés, ouvrage de A. Margairaz et préface de F. Oulès, L’impôt différencié à la dépense par A. Margairaz ; et enfin par Eugène Schuller, in La révolution de l’économie, Ed. S.E.M.P., 1941 ; L’impôt sur l’énergie, Ed. Du Rond-Point, 1952 ; Faut-il supprimer les impôts, Plon, 1957.

[55]En ce qui me concerne, il s’agirait plutôt d’une gradation de niveaux de développement affectant la totalité des pays sans exception. Ainsi peut-on parler, pour l’ensemble de ces pays, des pays en développement où chaque pays occupe dans cette gradation un degré, un niveau défini de développement.

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