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Licenciement à l’épreuve de COVID-19

Licenciement à l’épreuve de COVID-19*

 

Le Maroc, comme les autres pays du monde, connait depuis le mois de mars la pandémie de COVID-19[1] (acronyme anglais de coronavirus disease 2019). Ce virus dénommé Corona, (cette appellation lui a été attribuée par rapport à la couronne qui couvre la cellule), est contagieux d’une façon très rapide.

La maladie apparaît en novembre 2019 à Wuhan, en Chine centrale avec des cas inhabituels de pneumopathie justifiant de sévères mesures de confinement en janvier 2020. En mars 2020 l’épidémie est requalifiée en pandémie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS)[2]. La pandémie de Covid-19 se propage rapidement dans de nombreux autres pays qui prennent à leur tour des mesures similaires en mars, provoquant des fermetures de frontières, un brusque ralentissement de l’économie mondiale et un krach boursier le 12 mars 2020.

Aucun traitement spécifique ou médicament définitif pour cette maladie à travers le monde entier. Sauf que les gouvernements ont procédé au confinement de la population et isolement des cas suspects en les déposant dans une quarantaine sous surveillance médicale.

Le Maroc lui aussi n’est pas épargné par cette pandémie, qui s’est infiltré par des personnes rentrées de l’étranger notamment de l’Europe (Espagne, France et Italie), marocains ou touristes. La chose qui a incité les autorités à prendre des mesures préventives, telles que la fermeture des frontières, la suspension des vols internes et internationaux, et le confinement pour arrêter au maximum la propagation de la maladie et les dégâts qui en découlent[3].

Au vu les décisions prises par les autorités marocaines durant ces conditions actuelles, essentiellement le confinement, plusieurs entreprises ont été ou seront amenées à arrêter ou à réduire leur production et donc à diminuer les effectifs ou la durée du travail[4]. Une situation délicate, tout comme les problématiques juridiques qu’elle soulève.

Le code du travail marocain[5] a prévu plusieurs licenciements, entre autre le licenciement pour motif économique. Ainsi les articles 66 et suivants reprennent les modalités de licenciement pour motifs technologiques, structurels ou économiques et de la fermeture des entreprises.

Toutefois la question qui se pose dans ce sens, est ce que les employeurs n’abusent pas de cette conjoncture pour procéder au licenciement abusif de leurs employés sous prétexte des répercussions néfastes de la pandémie COVID-19 ? Une autre question est de savoir si la pandémie du coronavirus peut être qualifiée de force majeure ?

Le présent document consiste à traiter d’une façon non exhaustive la rupture du contrat de travail suite la pandémie actuelle. Il nous revient donc de mettre en relief des éclaircissements afin de répondre à ces questions tout en se référant à la législation en vigueur. En premier lieu, sera utile de définir la notion de force majeure et ses spécificités(I), et en deuxième lieu de distinguer le licenciement abusif de celui justifié (II).

  • La pandémie est-elle une force majeure ?

L’organisation mondiale de la santé a déclaré le 11 mars que l’épidémie COVID-19 est considérée comme pandémie[6]. Les origines de cette maladie encore inconnues et les chercheurs n’ont pas réussi à identifier ses sources. Les effets de cette pandémie ont surpassé les capacités humaines et les moyens y déployés. De ce constat, dans quelle mesure peut on considérer cette maladie une force majeure pour que les employeurs peuvent libérer leurs salariés.

Ce concept de force majeure, comme moyen d’exonération de responsabilité, peut être analysé à travers deux axes. Un premier sera consacré aux conditions qu’elle doit remplir la force majeure en droit commun (A), et un deuxième axe est réservé à l’identification de la spécificité de la force majeure en droit du travail (B).

  • La force majeure en droit commun

 La définition de la force est expressément envisagée à l’article 269 al-1 du Code des obligations et des contrats[7] (C.O.C) qui dispose « La force majeure est tout fait que l’homme ne peut prévenir, tel que les phénomènes naturels (inondations, sécheresses, orages, incendies, sauterelles), l’invasion ennemie, le fait du prince, et qui rend impossible l’exécution de l’obligation ».

Si le texte distingue force majeure et cas fortuit, (à la différence de la force majeure, le cas fortuit serait un événement interne à l’activité ou à l’entrepris du débiteur comme par exemple l’incendie dans ses locaux), la jurisprudence n’a pas consacré cette distinction et emploie les deux termes dans un sens identique[8].

Pour concrétiser sa légitimité, la force majeure doit revêtir trois principaux critères. Un événement pour être qualifié de force majeure doit être irrésistible. C’est-à-dire insurmontable par le débiteur qui se trouve dans l’impossibilité d’exécuter son obligation même à des conditions plus onéreuses ; l’appréciation se fait in abstracto[9]. Ce même événement doit être imprévisible au moment de la conclusion du contrat, l’appréciation constitue bien souvent un simple indice de l’irrésistibilité[10]. Un troisième critère s’ajoute aux précédents, celui de l’extériorité de l’événement. Cela signifie que ce dernier ne doit pas être imputable à un fait du débiteur ou de ses personnes dont il répond[11].

La jurisprudence comme la doctrine, a cependant considérablement fait évoluer ces critères, en déplaçant le curseur au gré des besoins. Ainsi a-t-elle pu affirmer parfois que la seule irrésistibilité de l’événement pouvait caractériser la force majeure[12]. Ces caractères suscitent un débat de savoir s’ils doivent être tous réunis ou seulement certains ? Ont-ils tous la même force ?

La jurisprudence revient sur ce point pour affirmer que seul un événement présentant un caractère imprévisible, lors de la conclusion du contrat, et irrésistible dans son exécution, est constitutif d’un cas de force majeure[13].

Force est de constater que plusieurs facteurs et fondements attribuent à la pandémie de COVID-19 la qualification de force majeure. Sans nier que les critères de cette dernière sont réunis dans la maladie de coronavirus qui échappe au contrôle dans plusieurs pays.

  • La force majeure en droit du travail

La qualification de la force majeure en droit du travail repose sur les mêmes critères du droit commun (droit des obligations et des contrats), considéré comme droit de référence. La relation contractuelle en matière sociale peut avoir un terme suite à la pandémie qui sous tend un événement imprévisible pour les peux parties du contrat de travail.

En droit du travail, le cas de la force majeure est un mode de cessation du contrat de travail.

  • Licenciement abusif ou justifié ?

La rupture de la relation du travail entre l’employeur et le salarié peut intervenir à n’importe quel moment. Cette rupture peut se faire tant à l’initiative du  salarié que de l’employeur. Elle peut résulter aussi d’une négociation[14]. Lorsque la rupture n’est pas à l’initiative du salarié (souvent il s’agit d’une démission), elle peut prendre la forme d’un licenciement de la part de l’employeur. Ce licenciement peut revêtir plusieurs formes prévues par la réglementation sociale. Cependant, ce qui nous intéresse est de savoir, dans ces conditions de la pandémie que traverse le Maroc, si l’employeur respecte les modalités et les procédures prescrites par le code du travail en du bonne et due forme et que le licenciement est légal (A), ou bien il y procède unilatéralement d’une manière abusive (B).

  • Licenciement justifié

La rupture du contrat de travail pour cas de force majeure est prévue légalement. C’est par exemple, le cas où une entreprise subit un événement majeur tel qu’un incendie, une inondation ou une tempête qui détruit la totalité de ses locaux. Dans ce cas, l’employeur peut mettre fin au contrat de travail de ses salariés tout en respectant la procédure de licenciement habituellement obligatoire.

Le licenciement pour motif économique peut avoir lieu lorsque l’entreprise connait une situation sans l’effet de la concurrence ou de la mauvaise gestion qui aura comme résultat que ses produits ne se vendent pas ; il en résulte une crise économique qui oblige l’employeur à diminuer sa production ou à licencier tous ou partie de son personnel[15].

Le code du travail prévoit une consultation des représentants syndicaux et l’implication des autorités (ministère du travail et de l’intérieur). A cette fin l’employeur nécessite l’autorisation du gouverneur, il doit suive une procédure qui commence par la saisie des représentants des salaries, dans tous les cas et quelque soit la cause de la résiliation il ya une indemnité au profit du salarié.

D’ailleurs, le licenciement pour motif économique n’est pas envisageable pour toutes les entreprises. La législation du travail astreint cette option à certaines conditions. D’abord, Les entreprises auxquelles s’appliquent les dispositions du Code du travail concernant le licenciement pour motif économique sont les entreprises commerciales, les entreprises industrielles, les exploitations agricoles ou forestières et leurs dépendances et les entreprises artisanales. Ainsi, les sociétés civiles, coopératives, syndicats, associations et professions libérales sont apparemment exclues de ce champ d’application.

Ces dispositions sont uniquement applicables aux entreprises employant habituellement plus de 10 salariés, ce qui pose la question de la procédure à mener dans les entreprises de moins de 10 salariés[16].

  • Licenciement abusif

Alors qu’il s’agit d’un arrêt temporaire[17] et une suspension provisoire du travail[18], il est recommandé, par sécurité, de ne pas rompre le contrat de travail en raison de l’épidémie du Covid-19 comme constituant un cas de force majeure, et ne sera en aucun cas motif de licenciement.

L’employeur, s’il procède de son propre gré à rompre le contrat du travail pour le seul motif de la force majeure la pandémie et les effets financiers probables qu’ils y sont liés, sera-t-il jugé d’un licenciement abusif ? La réponse est négative, puisque la jurisprudence jusqu’à présent est encore muée sur ce point. Toutefois la situation est délicate pour deux raisons. D’une part, le gouvernement a procédé à l’indemnisation des salariés des entreprises, qui ont arrêté leur travail suite aux mesures de confinement, par le biais de la caisse nationale de la sécurité sociale. Et d’autre part, l’arrêt du travail est provisoire pendant la durée du confinement, et le fonctionnement normal des entreprises aura lieu après cette période de suspension.

Notant à cet effet, que tout licenciement qui intervient dans le cadre de la pandémie doit être qualifié d’abusif, puisque l’arrêt du travail n’émane pas de la volonté du salarié, mais au contraire, il est lié aux mesures préventives et à la préservation de la santé générale des employés.

Le salarié licencié pour un motif qu’il juge abusif peut recourir à la conciliation[19] préliminaire auprès de l’inspection du travail. A défaut d’accord, le salarié peut avoir droit, par le biais de la justice, à des dommages et intérêts équivalents au salaire d’un mois et demi par année d’ancienneté sans toutefois dépasser 26 mois[20].

* Anass Ettassouli

Doctorant chercheur, faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Tanger.

[1] La COVID-19 est une maladie infectieuse causée par le dernier coronavirus qui a été découvert.

[2] Organisation mondiale de la santé : https://www.who.int/fr/emergencies/diseases/novel-coronavirus-2019

[3] Les communiqués des décisions à consulter sur le site : http://covid19.interieur.gov.ma/

[4] Rapport de l’organisation internationale du travail : le COVID-19 et le monde du travail. 2ème édition Estimations actualisées et analyses du 7 avril 2020.

[5] Loi 65.99 formant code du travail. Bulletin Officiel n°5210 du 16 Rabii 1425 (6 Mai 2004), p.600.

[6] Journal Le Monde du 11 mars 2020 disponible sur le site : www.lemonde.fr

[7] Dahir formant code des obligations et des contrats, tel qu’il a été modifié et complété.

[8] Arnaud LECOURT « fiches de Droit des obligations », 4ème édition. Ellipses 2014.

[9] Cass. Civ. 1ère , 6 nov. 2002, Contrats, concu., Conso., 2003, n° 53 obs. Leveneur.

[10] Cass. Com., 1er oct. 1997, RTD civ., 1998, P. 121, obs. Jourdain.

[11] Cass. Soc., 12 fev 2003 ; RDC, p. 59, obs. Stoffel-Munck.

[12] Cass. Civ. 1ère, 6 nov 2002, JCP éd, G, 2003, I, 152, n° 32, obs. Viney.

[13] Cass. Civ. 1ère, 30 octobre 2008, RTD civ ; 2009, p. 126, obs. Jourdain.

[14] Yvan LOUFRANI « Droit du travail – Tome 2 », Collection Tripalium, Editions EMS ; 2014.

[15] Art 66 du code du travail

[16] Article de journal « L’impossible licenciement économique » du 18 février 2016. A consulter sur : www.leseco.ma

[17] أثر جائحة كورونا على علاقات الشغل. الأستاذ محمد طارق

[18] Voir communiqué du ministère du travail et de l’insertion professionnelle : www.travail.gov.ma

[19] Guide de la conformité sociale CGEM février 2012

[20] Art 41 et 532 du code du travail

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